• Gaetano Donizetti
    L’Ange de Nisida
    Joyce El-Khoury, David Junghoon Kim, Laurent Naouri, Vito Priante, Evgeny Stavinsky, Royal Opera Chorus, Orchestra of the Royal Opera House, Sir Mark Elder (direction)

Pochette de l’album « L’Ange de Nisida », de Donizetti. / OPERA RARA / MACBETH MEDIA RELATIONS

Il a fallu attendre juillet 2018 pour que la création mondiale de L’Ange de Nisida, commandé à Donizetti par le Théâtre de la Renaissance suite au triomphe de Lucie de Lammermoor, connaisse enfin les feux de la rampe au Covent Garden de Londres. En partie recyclés dans La Favorite, des fragments de l’œuvre étaient connus mais la patience musicologique de Candida Mantica et les lumières d’écriture de Martin Fitzpatrick ont été nécessaires pour réaliser ce présent enregistrement, qui, pour n’être pas irréprochable sur le plan des voix, a le mérite de la primeur et de l’engagement. Le beau legato du ténor coréen, David Junghoon Kim en Leone, la vaillance certes un peu vitriolée de la soprano libano-canadienne Joyce El-Khoury en Sylvia, le belcantisme assermenté du roi d’Aragon, Vito Priante, et tout autant le Don Gaspar drolatique et nuancé de Laurent Naouri, font merveille. D’autant qu’ils sont accompagnés avec une théâtralité parfaite par un Mark Elder fin et exigeant à la tête d’excellents chœur et orchestre. Salut donc à cet Ange de Nisida opportunément apparu en discographie donizettienne. Marie-Aude Roux

2 CD Opera Rara/Macbeth Media Relations.

  • Jacques Lenot
    Reliquien
    Raphaël Duchateau (trompette), Julien Blanc (piano)

Pochette de l’album « Reliquien », de Jacques Lenot, avec Raphaël Duchateau (trompette) et Julien Blanc (piano). / L’OISEAU PROPHÈTE

Le cycle Reliquien (2015) de Jacques Lenot est bien dans la veine des créations de son compositeur, né en 1945. Libre comme l’air mais sophistiqué comme un secret d’alchimiste. Un motif de quelques notes au piano et des silences. Des surprises, aussi, comme les premiers éclats de trompette, échos, amorces ou prolongements de fantasques soliloques. Un jeu en 48 coups, regroupés en trois phases de 16, aux perspectives renouvelées. En fait, une captivante partie de cache-cache (mélodies estompées, timbres voilés) tout en poésie. Pierre Gervasoni

1 CD L’Oiseau prophète.

  • Alex Tassel
    Past & Present/A Quiet Place

Pochette de l’album « Past & Present/A Quiet Place », d’Alex Tassel. / PENINSULA MUSIC / L'AUTRE DISTRIBUTION

En 2010, Alex Tassel avait présenté dans le double album Heads or Tails (Naïve), deux de ses approches, celle du jazz acoustique des années 1950 et 1960, et celle du jazz électrique. Past & Present/A Quiet Place reprend la formule du double album et des deux styles, avec des formations différentes pour chaque – Tassel et le pianiste Jason Rebello étant les seuls musiciens communs. Tassel y joue du bugle, à la sonorité plus soyeuse, ronde, que la trompette. La part acoustique fait entendre l’imprégnation du second quintette acoustique de Miles Davis, des années 1964-1968. Même ancrage dans l’histoire et les libertés formelles. La part électrique évite les tentations virtuoses du jazz-rock des années 1970, traitée en légèreté, avec une attention à la mélodie, un swing de belle allure – le bassiste Reggie Washington y fait merveille. Sylvain Siclier

1 double CD Peninsula Music/L’Autre Distribution.

  • The Mystery Lights
    Too Much Tension !

Pochette de l’album « Too Much Tension ! », de The Mystery Lights. / DAPTONE RECORDS / DIFFER-ANT

Lorsque paraît, en 2016, le premier album de The Mystery Lights, une petite révolution se joue au sein du label brooklynois Daptone. L’institution soul rétro (Sharon Jones & The Dap-Kings, Charles Bradley) inaugure alors sa division rock, Wick Records, avec cette détonante formation d’obédience garage psychédélique. Mais le quintette emmené par les guitaristes Michael Brandon et Luis Alfonso Solano – originaires de Salinas en Californie, relocalisés depuis 2013 dans le Queens new-yorkais –, se veut détenteur d’un groove singulier, à la fois rêche et acidulé, suffisamment affirmé pour les imposer, notamment en concert, leur terrain de prédilection. Ce deuxième album enregistré dans le studio House of Soul, temple de l’analogique, parvient enfin à canaliser avec brio leur formidable tension scénique, alliance désinhibée de punk angulaire et de soul moite. Un peu comme si Prince se serait adjoint la section rythmique des Strokes. Too Much Tension ! devrait assurer à ces néons mystérieux une reconnaissance plus large. Franck Colombani

1 CD Daptone Records/Differ-ant.

  • Eiffel
    Stupor Machine

Pochette de l’album « Stupor Machine », d’Eiffel. / LE LABEL / PIAS

Après la parution de l’album, Foule monstre, en 2012, et une tournée, les quatre membres du groupe Eiffel, ont été pris par diverses aventures musicales personnelles. Romain Humeau (chant, guitare, claviers), Nicolas Bonnière (guitare), Estelle Humeau (basse, claviers) et Nicolas Courret (batterie) sont de retour ensemble avec Stupor Machine, tout en urgence rock, avec ici et là des ballades touchantes. Si l’élan des guitares électriques et l’emportement dominent (Big Data, Cascade, Manchurian Candidate, Oui, Escampette…), le groupe emmène aussi vers des climats aériens, en combinaisons exactes de guitares acoustiques et piano (N’aie rien à craindre, Hôtel borgne, Gravelines…). Cet ensemble assuré, dense, trouve une conclusion magistrale avec Terminus, qui de quelques notes de piano en soutien à l’expressivité vocale de Romain Humeau prend en ampleur orchestrale. S. Si.

1 CD Le Label/PIAS.

  • K.O.G & The Zongo Brigade
    Wahala Wahala

Pochette de l’album « Wahala Wahala », de K.O.G & The Zongo Brigade. / HEAVENLY SWEETNESS / L’AUTRE DISTRIBUTION

En swahili « wahala » signifie « problème », « souffrance », mais attention, ce disque n’est pas un disque de blues. Gonflé de voix, de guitare et de clavier joyeux, de percussions et de cuivres bouillonnants, afro-funky, groovy et caribéen, il claque comme un hymne au lâcher-prise. Installé en Angleterre, après avoir quitté le Ghana, le chanteur et percussionniste Kweku Sakey, alias K.O.G (pour Kweku Of Ghana) a eu sa part de soucis et de désenchantements, comme tous les migrants débarquant d’Afrique en Europe. Accompagné par un groupe efficace, dont le slameur jamaïcain Franz Von, il transforme peines et mauvais souvenirs en force, les évoque en procurant une sensation d’allégresse, une envie de danser. Sa morale ? Dans toute douleur, il y a matière à trouver de la joie. Voir comment on célèbre la mémoire des défunts en Afrique, lors des funérailles. Après le single Change, en 2018 avec le beatmaker français iZem, un réjouissant premier album. Patrick Labesse

1 CD Heavenly Sweetness/L’Autre Distribution.