Un médecin devant l’entrée du service d’urgence du CHU de Nantes, le 30 avril. / LOIC VENANCE / AFP

Dans une tribune publiée dans le Journal du dimanche (JDD) du 5 mai, plusieurs élus interpellent le gouvernement sur l’accès aux soins sur l’ensemble du territoire. Evoquant les « déserts médicaux », un « phénomène (qui) concerne aujourd’hui plus d’une commune sur trois », ces quelque 120 députés, sénateurs et élus locaux, majoritairement de La République en marche (LRM), du centre et des Républicains s’adressent à « l’ensemble des pouvoirs publics ».

Lire aussi l’entretien avec le géopgraphe Olivier Lacoste  : « Depuis dix ans, l’Etat n’a rien obtenu de tangible contre les déserts médicaux »

« Les solutions existent, certaines sont mises en place, alors que d’autres, comme la télémédecine, peinent à émerger (…). Pourquoi ? », écrivent-ils, en plaidant pour le développement de la téléconsultation « dont le faible développement à ce jour doit nous interroger collectivement ». « Des blocages administratifs limitent la portée » du remboursement prévu pour la consultation, déplorent-ils.

La ministre de la santé Agnès Buzyn, dont le projet de loi santé sera examiné au Sénat en juin, souligne de son côté, dans un entretien au JDD, que « plus de 11 500 téléconsultations ont déjà été réalisées, soit 1 000 par semaine ». Elle assure avoir pris le sujet des déserts médicaux « à bras-le-corps » avec « un plan d’urgence dès octobre 2017 ».

« Enorme hiatus »

Le projet de loi santé « répond à cette démographie déclinante [des médecins] en organisant les tâches » pour qu’ils puissent « libérer du temps pour de nouveaux patients », poursuit-elle, citant au nombre des mesures en ce sens la création d’assistants médicaux, les infirmiers en pratiques avancées ou les vaccinations en pharmacie. « Tout ce que nous mettons en place permettra de libérer 3 millions de consultations, soit l’équivalent de 800 médecins généralistes supplémentaires », affirme Mme Buzyn.

Mais Patrick Bouet, président du Conseil national de l’Ordre des médecins, se montre plus pessimiste, insistant sur l’« énorme hiatus entre l’espoir suscité par la promesse de réforme et les faits ». Interrogé dans l’hebdomadaire, il exprime sa crainte que ce projet de loi « d’orientation générale » laisse la « puissante technostructure du ministère (…) plaquer sur les territoires sa volonté de normalisation administrative ».

Or, il faut selon lui « adapter le modèle très normé proposé (…) à tous les territoires ». La Seine-Saint-Denis, où il exerce, et la Lozère n’ont pas les mêmes besoins, fait-il valoir. Dans le premier cas, « on manque de pédiatres et de pédopsychiatres », dans le second « il y a besoin de services de gériatrie et de lits de moyen séjour ». Quant à la télémédecine, c’est « une avancée, mais c’est un leurre de dire qu’elle réglera tout ».

M. Bouet est en revanche d’accord avec la ministre pour dire, concernant l’installation des jeunes médecins, que « la coercition est une fausse bonne idée ».

400 médecins salariés ou mixtes dans les déserts médicaux

Lors de la présentation de son plan « Ma santé 2022 », en septembre 2018, Emmanuel Macron s’était engagé à envoyer à brève échéance 400 médecins généralistes à exercice partagé ville-hôpital ou salariés dans les « déserts médicaux », pour pallier le manque de médecins libéraux. Afin d’honorer cette promesse, le ministère de la santé va créer 200 postes payés moitié par l’hôpital et moitié à l’acte, accessibles dès la fin de l’internat, qui serviront de « tremplin à l’installation » pour les jeunes diplômés. Pour les 200 autres postes, une « garantie financière » sera apportée pendant deux ans aux hôpitaux de proximité ou aux centres de santé qui créeront un poste de médecin généraliste salarié dans les territoires en difficulté.