Sept prévenus, dont d’anciens dirigeants de France Télécom, comparaissent à partir de lundi devant le tribunal correctionnel de Paris pour répondre de « harcèlement moral » ou de complicité de ce délit, à la suite d’une vague de suicides de salariés de l’entreprise entre 2007 et 2010. Or les délits d’« homicide involontaire » et de « mise en danger de la vie d’autrui » étaient initialement visés, dans le réquisitoire introductif de l’information judiciaire et dans la plainte d’un syndicat, mais ils ont été écartés par les juges d’instruction.

L’article 221-6 du code pénal définit l’homicide involontaire par « le fait de causer, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui ». Il est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Contrairement au harcèlement moral, il suppose « la démonstration d’un lien de causalité certain, même non exclusif », entre la faute reprochée à la personne et le dommage. Les juges d’instruction ont considéré que ce lien de causalité « est difficile à démontrer dans les décès par autolyse, le suicide étant analysé comme un fait multifactoriel ».

Pas de circonstance aggravante

L’article 223-1 du code pénal définit la mise en danger de la vie d’autrui par « le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ». Elle est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Le texte exige la réunion de deux éléments : le manquement à une obligation particulière de sécurité et l’exposition à un risque immédiat. Soulignant que la jurisprudence a refusé d’étendre cette infraction à l’obligation générale de sécurité qui pèse sur les employeurs en matière d’hygiène et de sécurité, les juges d’instruction ont donc prononcé un non-lieu.

Concernant le harcèlement moral (article 222-33-2 du code pénal), le texte n’exige pas la preuve de l’intention de nuire. Il n’est donc pas nécessaire, rappellent les juges, que les agissements reprochés aux prévenus aient eu « initialement » pour objet ou pour effet d’attenter à la dignité ou à la santé de la victime. Il suffit qu’ils aboutissent à cet objet ou à cet effet. La loi ne prévoit pas non plus de circonstance aggravante « découlant de la pluralité d’auteurs ou du caractère organisé des agissements incriminés ». La modification intervenue en 2014 qui a aggravé les sanctions encourues pour des faits de harcèlement moral (deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende) ne s’applique pas aux prévenus de ce procès.