Extrait de la série « ABC contre Poirot », diffusée à partir du 9 mai sur Canal+. / Canal+

LA LISTE DE LA MATINALE

Cette semaine, le rétro le dispute au moderne, avec une adaptation en mini-série, relativement classique mais très réussie, d’Hercule Poirot, la fin de la formidable saison 3 de Better Things, et Lunatics, la nouvelle série du comique Chris Lilley créée pour Netflix.

« ABC contre Poirot » : une adaptation délicieusement poisseuse

ABC contre Poirot - BA Canal+
Durée : 00:45

Oubliez les moustaches lustrées et les gants blancs, attributs éternels de ce personnage suranné. Ce Poirot-là n’est plus très vert, mais beaucoup plus intéressant que la plupart de ces prédécesseurs.

Cette mini-série de Canal+ qui met en scène le plus célèbre des détectives belges a la bonne idée de montrer Poirot en privé vieillissant, animateur de « murder parties » pour la petite noblesse locale, et désormais persona non grata chez Scotland Yard, dont on ne sait pas trop si c’est à cause de ses mensonges passés ou tout simplement parce que les Belges ne sont plus très bien vus, dans cette Angleterre des années 1930 où la British Union of Fascists rencontre un certain succès.

Incarné ici par John Malkovich, Poirot est nargué par un criminel qui semble l’avoir bien connu et prend un malin plaisir à tuer selon un schéma d’une grande simplicité : par ordre alphabétique. Quoi de moins original qu’une énième adaptation d’un roman d’Agatha Christie ? Surtout quand on croit savoir, dès le début, l’identité du coupable ?

L’intérêt de cette adaptation délicieusement poisseuse, notamment grâce à une photographie impeccable et des décors léchés, est de rappeler qu’avant de connaître la gloire au fil des enquêtes, Hercule Poirot fut un réfugié de guerre, meurtri par un crime odieux et profondément marqué par son exil.

Malgré le jeu hiératique de Malkovich et son accent fabriqué peu crédible, cette facette-là du personnage, rarement explorée, est dans cette adaptation habilement mise au service de l’intrigue. Et rend justice à l’histoire britannique, en soulignant toutes les contradictions d’une époque. Audrey Fournier

ABC contre Poirot, écrit par Sarah Phelps et réalisé par Alex Gabassi, avec John Malkovich, Rupert Grint, Andrew Buchan (Royaume-Uni 2019, 4 x 45 min). Episodes 1 et 2 diffusés jeudi 9 mai à 20 h 50 sur Canal+. L’intégralité des épisodes sera disponible à la demande à partir du 9 mai sur MyCanal.

« Better Things », saison 3 : les choses de la vie

Better Things Saison 3 - Bande Annonce - CANAL+
Durée : 01:30

Le dixième et dernier épisode de la troisième saison de Better Things, créée par Pamela Adlon et Louis C.K. (dont elle s’est désolidarisée depuis qu’il a reconnu avoir commis des actes inappropriés envers des femmes et qu’elle a remplacé depuis comme coscénariste) vient d’être diffusé par Canal+ Séries.

Le départ de celui avec qui elle avait également coécrit la série Louie (2010-2015), qui racontait le pendant masculin – si l’on ose dire – de Better Things, ne semble pas avoir été dommageable : on aura pu constater cette fois encore que le ton subtil, inventif et souvent direct (voire cru), l’art de dire beaucoup à propos de petites choses de la vie que chaque spectateur aura peu ou prou lui-même vécues, ont à nouveau fait des merveilles, comme au cours des saisons précédentes.

La relation d’une mère célibataire et de ses trois filles, l’âge de la ménopause arrivant et le désir qui ne cesse pas, une mère âgée qui décroche doucement mais de plus en plus sûrement du réel, les hommes incertains et les copines sûres, tout ceci parlera aux femmes mais pas seulement.

Car, tout en étant profondément féministe, Better Things sait dépasser son cadre présumé. On s’attend chaque saison à ce qu’elle soit la dernière – les propos poétiques et subtils ne tiennent pas toujours la rampe longtemps – mais on respire : FX, la chaîne américaine d’origine de Better Things, l’a renouvelée pour une quatrième saison en 2020. Renaud Machart

Better Things, saison 3. Série créée par Pamela Adlon et Louis C.K. Avec Pamela Adlon, Mikey Madison, Hannah Alligood, Olivia Edward, Celia Imrie (Etats-Unis, 2019, 10 × 20 min). Les trois saisons sont disponibles sur Canal+ Replay et MyCanal.

« Lunatics » : drôle ou pas drôle ?

Lunatics | Official Trailer [HD] | Netflix
Durée : 02:11

L’acteur comique (et musicien) australien Chris Lilley, possède, comme la Britannique Tracey Ullman, un génie transformiste assez rare. Tracey Ullman imite et contrefait souvent des personnes connues (Judi Dench, Angela Merkel, Brigitte Macron mais aussi Jeremy Corbyn) tandis que Chris Lilley, dans ses faux documentaires, invente des personnages fictifs et caricaturaux.

Dans Angry Boys (2011), à notre sens la meilleure de ses séries (disponible sur OCS), et dans Ja’mie : Private School Girl (2013), on l’a vu incarner une jeune écolière folle de son corps, un jeune rappeur noir sur le déclin (« blackface » qui lui a valu une jolie polémique), une surveillante de centre de redressement pour jeunes délinquants, des jumeaux à la médiocrité crasse, etc.

Dans Lunatics (2019), que propose Netflix, il est une actrice porno à la retraite, une médium lesbienne pour animaux de riches propriétaires ou encore, entre autres, un directeur de magasin de vêtements attiré sexuellement par des caisses enregistreuses et des aspirateurs… Toujours aussi « limite » dans le mauvais goût et la mal-pensance, Chris Lilley ne nous a malheureusement pas fait rire cette fois.

Mais, si l’on consulte les réactions des spectateurs sur les réseaux sociaux, on constate qu’elles sont partagées. Dans ce cas, on veut bien endosser le rôle de Jean qui pleure et inviter à découvrir ce comedian assez délirant. R.Ma.

Lunatics, série créée et interprétée par Chris Lilley (Australie, 2019, 10 × 40 min). Disponible à la demande sur Netflix.