Malgré les critiques, la France poursuit sa livraison d’armes à l’Arabie saoudite, engagée dans une guerre au Yémen. L’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) a donc déposé jeudi 9 mai un recours en urgence au tribunal administratif de Paris afin d’empêcher le départ du Havre (Seine-Maritime) d’un cargo saoudien chargé d’armes qui pourraient, selon l’ONG, être utilisées dans cette guerre meurtrière. L’association a déposé un « référé liberté », visant à protéger une liberté fondamentale menacée.

De son côté, la France a reconnu qu’un navire saoudien allait effectuer un chargement d’armes, mais elle a assuré qu’elle ne disposait d’« aucune preuve » permettant d’affirmer que des armes françaises étaient utilisées au Yémen.

Selon le site d’investigation Disclose, le navire doit prendre livraison de « huit canons de type Caesar » que l’Arabie saoudite pourrait utiliser dans la guerre qu’elle livre au Yémen aux rebelles houthistes, minorité chiite soutenue par l’Iran, grand rival de Riyad. « L’Etat français ne peut ignorer que ces armes peuvent servir à commettre des crimes de guerre au Yémen, où plus de 400 000 civils sont potentiellement sous le feu », a déclaré l’avocat de l’ACAT, Joseph Breham.

Recours examiné dans la journée

L’ACAT conteste la décision de la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) d’autoriser le cargo Bahri Yanbu battant pavillon saoudien « à procéder à un chargement, exportation et transfert au sens de l’article 6 du traité sur le commerce des armes, de matériels de guerre et matériels assimilés, dans le port du Havre, à destination finale Djedda en Arabie saoudite ».

Ce traité de l’Organisation des Nations unies, entré en vigueur en 2014, vise à réguler le commerce des armes dans le monde. Son article 6 porte sur les interdictions de transfert d’armes : il stipule notamment qu’« aucun Etat partie ne doit autoriser le transfert d’armes classiques (…) s’il a connaissance, au moment où l’autorisation est demandée, que ces armes ou ces biens pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des conventions de Genève de 1949, des attaques dirigées contre des civils ou des biens de caractère civil et protégés comme tels, ou d’autres crimes de guerre tels que définis par des accords internationaux auxquels il est partie ».

Le recours devrait être examiné dans la journée, selon l’avocat de l’ACAT.