Après l'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 15 avril. / JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR "LE MONDE"

Face aux centaines de millions d’euros de dons et promesses de dons de particuliers, le gouvernement veut entourer la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris d’un texte de loi sur mesure, examiné par les députés, vendredi 10 mai, près d’un mois après l’incendie ayant endommagé l’édifice le 15 avril.

Défi technique, architectural et financier, le chantier est l’objet de débats, soulevés à l’occasion de la présentation du projet de loi : des députés d’opposition critiquent notamment un blanc-seing donné au gouvernement pour la création d’un établissement public chargé de la conception et de la réalisation des travaux, prévu par le texte de loi sans que sa composition ne soit connue.

Plus encore, c’est la carte blanche pour déroger à certaines règles d’urbanisme, de protection de l’environnement, de commande publique ou de préservation du patrimoine qui nourrit les discussions, beaucoup y voyant les conséquences de la volonté du président Emmanuel Macron de voir se réaliser les travaux d’ici à 2024. « Il n’est pas question de remettre en cause les principes fondamentaux de la préservation du patrimoine », mais de « gagner du temps sur les démarches administratives », a tenté de rassurer le ministre de la culture, Franck Riester.

« Les bâtisseurs de cathédrales travaillent pour l’éternité. Qui sommes-nous pour précipiter la rénovation de Notre-Dame et nous éloigner des règles d’urbanisme ? », a dénoncé la députée de droite Brigitte Kuster. « Ce n’est pas en imposant un agenda » calqué sur « les Jeux olympiques de Paris en 2024 » que « nous seront fidèles » à Notre-Dame, a fustigé le député de gauche Alexis Corbière, la communiste Marie-George Buffet redoutant pour sa part que ces « dérogations » ne créent « un précédent ».

« Empêcher des gestes architecturaux »

Enfin, si la question architecturale n’est pas évoquée dans le projet de loi, certains comptent bien la mettre sur la table lors de son examen, qui débute vendredi. La députée Les Républicains Constance Le Grip souhaite une restauration « à l’identique », afin d’« empêcher des gestes architecturaux qui aillent trop loin ». Le dirigeant de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan, a lui décidé de lancer une pétition pour une reconstruction « à l’identique ». Anne Brugnera (La République en marche), affirme en s’appuyant sur l’avis d’architectes que c’est « en fait impossible, voire irréaliste ». « Même si nous sommes tous attachés à l’image que nous avions de Notre-Dame (…), il ne faut rien écarter. »

Le texte entérine également, dans sa première partie, l’ouverture de la souscription nationale depuis le 16 avril, et prévoit que l’ensemble des dons recueillis seront reversés à l’Etat ou à un établissement public – un élément du projet de loi peu critiqué au sein de l’Hémicycle.

Le montant total des travaux pourrait, selon plusieurs estimations, atteindre 600 à 700 millions d’euros, et le ministre de la culture a affirmé que « tout l’argent des dons » irait bien à Notre-Dame. Les députés souhaitent tout de même savoir ce que l’Etat ferait d’un éventuel surplus des dons, une fois les travaux réalisés. Des élus ont suggéré de redistribuer l’argent restant à d’autres cathédrales ou églises en péril : selon l’Observatoire du patrimoine religieux, environ 5 000 édifices religieux se délabreraient dans le pays. La France compte entre 40 000 et 60 000 églises et chapelles.

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