Des responsables du port de Foujeyra photographient, lundi 13 mai,  le « Andrea Victory », l’un des quatre navires endommagés lors d’« un acte de sabotage » la veille. / SATISH KUMAR / REUTERS

L’annonce par les Emirats arabes unis (EAU), dimanche 12 mai, en pleine escalade diplomatique entre l’Iran et les Etats-Unis, que quatre navires, dont trois pétroliers, avaient été la cible d’« actes de sabotage » à l’entrée du golfe Arabo-Persique, a provoqué une subite montée des tensions dans cette région.

Selon le communiqué diffusé par le ministère des affaires étrangères émirati, les attaques, sur lesquelles on dispose de très peu d’informations pour l’instant, se sont produites au large du port de Foujeyra. Cet émirat, qui est l’une des sept principautés formant les EAU, est situé à la sortie du détroit d’Ormuz, c’est-à-dire hors du Golfe, en eaux libres ouvrant sur la mer d’Oman.

Les quatre bateaux concernés sont deux tankers saoudiens, Al-Marzoqah et Amjad, qui appartiennent à la compagnie Bahri, le transporteur maritime du royaume, un navire enregistré en Norvège, le Andrea Victory, transportant lui aussi des produits pétroliers et une barge battant pavillon émirati, l’A. Michel. Les sabotages supposés n’ont causé ni victime ni déversement d’hydrocarbures en mer.

Une entaille dans la coque

Les Emirats et l’Arabie saoudite, qui partagent l’hostilité de l’administration américaine à l’égard de Téhéran, n’ont fourni aucun détail sur la nature des attaques alléguées et se sont abstenus de désigner un responsable. Riyad a condamné un « acte criminel », ayant « une incidence néfaste sur la paix et la sécurité régionale et internationale ». Abou Dhabi a appelé la communauté internationale à « empêcher que de telles actions soient commises par des parties cherchant à porter atteinte à la sécurité de la navigation ».

Le seul élément tangible disponible lundi soir consistait en quelques images de l’arrière du Andrea Victory, montrant une entaille dans la coque

Le seul élément tangible disponible lundi soir consistait en quelques images de l’arrière du Andrea Victory, montrant une entaille dans la coque, au niveau de la ligne de flottaison. La compagnie Thome, qui a affrété ce navire, a déclaré qu’il avait été « touché par un objet indéterminé ». Le ministre d’Etat émirati des affaires étrangères, Anouar Gargash, a promis une « enquête professionnelle », tout en soulignant qu’Abou Dhabi avait déjà « sa propre lecture et ses propres conclusions ».

L’Iran, qui menace régulièrement de fermer le détroit d’Ormuz en cas de confrontation avec les Etats-Unis, a déploré lui aussi ces développements. Abbas Moussavi, porte-parole du ministère des affaires étrangères, a parlé d’incidents « alarmants et regrettables », tout en mettant en garde contre « l’aventurisme [d’acteurs] étrangers » – une allusion aux pressions croissantes de l’administration américaine sur la République islamique.

« Signaux clairs »

Les Etats-Unis ont renforcé leurs sanctions économiques anti-Téhéran depuis qu’ils se sont retirés de l’accord sur le programme nucléaire iranien en 2018, jugé trop laxiste par le président Donald Trump. Mardi, le New York Times rapportait que le conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, avait fait renouveler par le Pentagone et présenter à la Maison Blanche un plan de déploiement militaire massif au Proche-Orient, incluant 120 000 troupes, en cas de crise avec l’Iran.

Cette fuite a lieu après que l’administration américaine a annoncé plusieurs renforcements de son dispositif militaire permanent dans la région, dont l’envoi d’un bâtiment de guerre transportant des véhicules, notamment amphibies, et d’une batterie de missiles Patriot. Le Pentagone avait justifié cette démonstration de force par des « signaux clairs (…) montrant que les forces iraniennes et leurs affidés se préparent à une attaque possible contre les forces américaines ».

Un cinquième de la consommation de pétrole mondiale passe à travers le détroit d’Ormuz. Une des perturbations majeures de ce commerce maritime remonte à la guerre Iran-Irak (1980-1988). Plus de 500 navires avaient été alors détruits ou endommagés, mais le trafic pétrolier s’était cependant poursuivi, malgré le conflit.