Un FAS 90 utilisé durant une compétition à Romont, en Suisse. / DENIS BALIBOUSE / REUTERS

Les Suisses vont-ils s’aligner sur les mesures anti-terroristes de l’Union européenne (UE) ? Ils se prononceront, dimanche 19 mai, par référendum sur une loi visant à durcir les conditions d’acquisition de certaines armes, un texte critiqué par le milieu du tir sportif, très répandu dans le pays.

Le gouvernement a averti les électeurs qu’un rejet de cette nouvelle législation pourrait conduire à une exclusion de la Confédération – qui n’est pas membre de l’UE – des accords européens de Schengen et Dublin auxquels elle est associée. Une telle exclusion aurait des conséquences dans les domaines de la sécurité et de l’asile, mais aussi en matière de tourisme, et coûterait « plusieurs milliards de francs suisses par an », selon les autorités fédérales.

Estimant ces menaces « exagérées », les milieux du tir ont lancé un référendum, en affirmant que cette loi sera « totalement inutile face au terrorisme », qu’elle « supprimera le droit de posséder une arme et enterrera le tir sportif ». Ils estiment aussi possible de trouver une « solution pragmatique » avec l’UE. L’Union démocratique du centre (UDC), parti de droite populiste qui recueille le plus de suffrages dans le pays, est seul à soutenir les opposants à la nouvelle loi.

Mais les sondages ne donnent pas leur camp vainqueur. La dernière étude d’opinion, publiée le 8 mai par l’institut GfS. Bern crédite en effet le « non » du soutien de seulement 34 % des électeurs, contre 65 % en faveur du « oui » (et 1 % d’indécis).

Un attachement pour les armes

Des affiches pour inciter à voter « non » au référendum du 19 mai. / DENIS BALIBOUSE / REUTERS

Les armes sont très répandues en Suisse, même si en l’absence de registre fédéral, il est difficile de savoir combien circulent exactement. Selon le centre de recherches genevois Small Arms Survey, en 2017 plus de 2,3 millions d’armes étaient aux mains de civils en Suisse, soit près de trois pour 10 habitants, ce qui classe la Suisse au 16e rang mondial pour le nombre d’armes par habitant.

La nouvelle législation ne prévoit pas de registre central, mais impose le marquage de tous les éléments essentiels d’une arme. Elle classe les armes semi-automatiques munies d’un chargeur de grande capacité dans la catégorie des armes dites « interdites », mais collectionneurs et tireurs sportifs pourront encore les acquérir en demandant une « autorisation exceptionnelle ». Les tireurs devront démontrer après cinq ans puis dix ans qu’ils continuent à pratiquer régulièrement.

En Suisse, pays où les fusillades sont très rares, l’attachement pour les armes est façonné par la tradition d’une armée de miliciens gardant leur fusil chez eux. Fête fédérale de tir, compétitions populaires… les occasions sont nombreuses pour s’exercer et l’intérêt pour les calibres de toutes sortes a connu un regain ces dernières années.

Les milieux du tir voient dans la nouvelle loi un « diktat de l’UE ». Si elle passe, « il faut savoir que 80 % des armes qui sont utilisées par les tireurs sportifs (…) tombent sous le coup de l’interdiction », s’insurge Serge Vidal, secrétaire du Comité genevois Liberté et Ouverture.

Lisa Mazzone, élue nationale des Verts, estime qu’une victoire du « oui » enverrait un « signal positif sur la capacité des Suisses » à mieux vouloir encadrer, à l’avenir, la possession des armes.