En échange de l’indulgence des services antidopage de la fédération internationale d’athlétisme (IAAF), Lamine Diack aurait obtenu des fonds russes pour des campagnes politiques au Sénégal. / Mikhail Klimentyev / AP

L’affaire de corruption au sein de la fédération internationale d’athlétisme (IAAF) pour couvrir des cas de dopage d’athlètes russes pourrait être jugée à Paris d’ici quelques mois. Dans un réquisitoire, signé jeudi 16 mai et dont a eu connaissance l’Agence France-presse, le parquet national financier (PNF) demande la tenue d’un procès en France contre, notamment, le Sénégalais Lamine Diack, ex-patron de l’athlétisme mondial (1999-2015).

Si le juge d’instruction anticorruption Renaud Van Ruymbeke suit ces réquisitions, Lamine Diack, âgé de 85 ans, devrait répondre notamment de « corruption active et passive » et « blanchiment en bande organisée ». Le PNF souhaite le voir jugé au tribunal correctionnel au côté de cinq autres personnes, dont son fils et ex-puissant conseiller marketing à l’IAAF, Papa Massata Diack.

  • Sur quoi l’enquête a-t-elle porté ?

Ouverte en novembre 2015 par le parquet national financier, après un signalement de l’agence mondiale antidopage (AMA), cette enquête aux ramifications internationales a mis au jour un pacte de corruption présumée : en échange de l’indulgence des services antidopage de l’IAAF, Lamine Diack aurait obtenu des fonds russes pour des campagnes politiques au Sénégal.

Le pacte aurait aussi permis de faciliter des négociations avec des sponsors et des diffuseurs russes, avant les Mondiaux d’athlétisme à Moscou en 2013.

  • Pourquoi la justice française enquêtait-elle ?

La justice française est compétente parce que des fonds ont pu être blanchis sur son territoire. Avisé d’un rapport d’une commission indépendante de l’AMA, le parquet national financier avait d’abord ouvert une information judiciaire, le 1er octobre 2015, sur des soupçons de corruption à l’IAAF. L’enquête avait ensuite été confiée à trois juges d’instruction menés par Renaud Van Ruymbecke.

  • Quelles sont les personnes incriminées ?

En novembre 2015, les magistrats financiers ont mis en examen pour corruption Lamine Diack, son conseiller de l’époque Habib Cissé et l’ancien chef de l’antidopage de l’IAAF, Gabriel Dollé. Ce dernier a reconnu les faits et demandé une procédure de plaider-coupable.

Lamine Diack est également soupçonné d’« abus de confiance » pour avoir permis, « du fait de ses fonctions », à son fils, Papa Massata Diack, « de s’approprier des recettes de l’IAAF provenant de sponsors », tels que la banque d’Etat russe VTB, le Sud-Coréen Samsung, la société chinoise Sinopec, Abu Dhabi Corporation ou la télévision chinoise CCTV, selon le réquisitoire.

Depuis Dakar où il est installé, Lamine Diack n’a jamais répondu aux sollicitations de la justice française, qui a lancé un mandat d’arrêt contre lui.

Un mandat d’arrêt international a également été lancé en 2017 à l’encontre de Papa Massata Diack. Installé à Dakar, il n’a jamais répondu à la justice française.

Le parquet demande enfin un procès contre Valentin Balakhnichev, ex-président de la Fédération russe d’athlétisme (ARAF) et ancien trésorier de l’IAAF, et Alexeï Melnikov, qui fut l’entraîneur en chef des courses de fond à l’ARAF.

Tous deux sont réclamés par la justice française, le premier pour corruption passive et active, ainsi que blanchiment aggravé, et le second pour corruption passive.