La Voix du Nord persiste et ne signe pas. Plus d’un an après avoir annoncé mettre fin à la pratique de faire relire les interviews par les personnalités interrogées, le quotidien régional a décliné une invitation à participer, lundi 20 mai, à une interview collective du président Emmanuel Macron. Ce dernier, de plus en plus engagé dans la campagne des élections européennes, avait négocié cet entretien consacré à l’Europe avec le Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR), qui regroupe une cinquantaine de titres, tels Le Dauphiné libéré, Ouest-France, Le Parisien, Sud Ouest, Le Télégramme, et une dizaine de groupes de presse.

Les journalistes qui se sont rendus à l’Elysée lundi ont prévu de faire paraître leurs articles, pour certains, dès lundi soir sur leur site, sinon mardi, dans les éditions papier. Mais La Voix du Nord a fait cavalier seul. Dans un Tweet, le rédacteur en chef, Patrick Jankielewicz, a jugé qu’« à cinq jours du scrutin, cela perturberait l’équilibre du traitement de la campagne auquel nous essayons de veiller ». « Et la publication est soumise à la relecture préalable de l’Elysée. Donc c’est sans nous », a-t-il ajouté.

« Principe d’équité »

Dans l’entourage d’Emmanuel Macron, on dit « respecter le choix éditorial » de La Voix du Nord de ne pas participer à l’interview du chef de l’Etat. « Le journal invoque un principe d’équité, nous le comprenons », indique une source proche du chef de l’Etat. Néanmoins, certains s’agacent du procès intenté au président de la République, qui aurait fait de la relecture de l’entretien une condition sine qua non de sa réalisation. « Ce n’était pas une exigence mais une préférence, assure un membre de l’entourage présidentiel. Les huit autres groupes de presse quotidienne régionale ont accepté le principe d’une relecture, mais si on nous avait dit non, l’interview aurait quand même eu lieu. »

En janvier 2018, le rédacteur en chef s’était expliqué dans un éditorial sur sa décision de ne plus faire relire les interviews ; une pratique qui s’est répandue. A l’époque, M. Macron, qui se rendait en déplacement dans la région, avait refusé d’être interviewé par le journal. A la place, le quotidien s’était vu proposer d’interroger le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, à condition qu’il puisse relire et corriger le texte avant publication.

« Jusque-là, comme la quasi-totalité de nos confrères, nous acceptions cette relecture sous prétexte que la parole d’un ministre a quasiment force de loi. Mais si certains des interviewés jouent le jeu en corrigeant à la marge des aspects techniques, la relecture est devenue un exercice de réécriture pour la plupart », avait-il annoncé : « Nous mettons donc fin aujourd’hui à cette pratique de relecture. »