L’écrivain et militant homosexuel kényan Binyavanga Wainaina, à Nairobi, en septembre 2014. / Stringer / REUTERS

L’écrivain kényan Binyavanga Wainaina, devenu une icône de la cause des droits des homosexuels en Afrique après avoir fait son coming out en 2014, est décédé dans la nuit du 21 au 22 mai à l’âge de 48 ans, a annoncé mercredi sa maison d’édition. L’auteur, qui avait reçu en 2002 le prix Caine, une des plus prestigieuses récompenses pour la littérature africaine en langue anglaise, est mort quelques jours à peine avant un jugement attendu de longue date qui pourrait décriminaliser l’homosexualité au Kenya.

« Il est décédé la nuit dernière », a déclaré à l’AFP Tom Maliti, président du Kwani Trust, une maison d’édition basée à Nairobi et fondée par Binyavanga Wainaina. L’écrivain et journaliste avait été victime d’une crise cardiaque en 2015 et avait le sida. En 2018, il avait indiqué vouloir épouser son partenaire de longue date en Afrique du Sud.

Son frère James a raconté à la radio Capital News que les condoléances affluaient du monde entier. « Nous avons perdu Ken la nuit dernière. Nous pleurons sa perte […], mais Ken était une personne incroyable, avec une finesse d’esprit incroyable », a-t-il déclaré. Binyavanga Wainaina avait reçu des éloges et bénéficiait d’une large audience pour l’ensemble de son œuvre, dont son essai satyrique How to Write About Africa.

« Je suis homosexuel, maman »

Mais sa figure divisait parfois dans son Kenya natal, où des lois datant de la période coloniale criminalisent l’homosexualité. Binyavanga Wainaina avait provoqué un énorme débat en 2014 en révélant son homosexualité dans une nouvelle publiée en ligne intitulée Je suis homosexuel, maman. « Moi, Binyavanga Wainaina, je jure très honnêtement avoir su que je suis homosexuel depuis que j’ai 5 ans », écrivait-il dans cette nouvelle dédiée à sa mère décédée.

Ce texte est « un acte politique », avait à l’époque expliqué à l’AFP Binyavanga Wainaina, qui l’avait écrit quelques jours après la promulgation d’une loi anti-homosexualité au Nigeria, pays qu’il admirait et considérait comme sa seconde patrie. Il avait reçu d’innombrables messages de soutien et avait été nommé parmi les personnalités les plus influentes au monde par Time cette année-là.

Mais il était aussi la cible publique de tous ceux qui dénoncent l’homosexualité sur le continent. Vingt-huit pays sur quarante-neuf en Afrique subsaharienne ont des lois pénalisant les relations homosexuelles. Un tribunal kényan doit rendre vendredi son jugement sur la constitutionnalité de deux lois datant de l’époque coloniale et criminalisant l’homosexualité. Ce jugement était attendu en février, mais les juges avaient repoussé à mai leur décision, arguant alors d’une charge de travail trop importante. Les militants voient là l’opportunité pour le Kenya de servir d’exemple en Afrique.