Alerte à la silice cristalline ! Ce minéral, très répandu dans de nombreux secteurs d’activité – la construction, notamment –, présente « un risque sanitaire particulièrement élevé » pour des dizaines de milliers de salariés. C’est la conclusion d’un « avis » diffusé mercredi 22 mai par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). L’expertise, d’une quarantaine de pages, formule plusieurs recommandations pour améliorer la « protection » des personnes en « milieu professionnel ».

La toxicité potentielle de la silice cristalline est identifiée depuis longtemps. En 1997, elle avait été classée « en tant que substance cancérogène avérée pour l’homme » par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Dans plusieurs pays (Israël, Espagne, Etats-Unis…), des études avaient par ailleurs montré des « cas de silicoses graves » imputables « à l’usage de pierres reconstituées contenant de forts pourcentages » de ce minéral.

L’Anses a donc souhaité procéder à un « état des lieux » sur la problématique, en mettant la focale sur le monde du travail. Car la silice fait l’objet d’une multitude d’« applications » : fonderie, verrerie, peintures, etc.

De cette enquête, il ressort que « près de 365 000 travailleurs » en France seraient en contact, par inhalation, avec de la silice cristalline. Pour 23 000 à 30 000 d’entre eux, le niveau d’exposition dépasserait « la valeur limite » admise en situation professionnelle par la réglementation – soit 0,1 mg par m³, à l’heure actuelle. Quatre branches d’activité « sont plus particulièrement concernées » : le bâtiment et les travaux publics, en tout premier lieu, suivis par les entreprises fabriquant des produits minéraux non métalliques (ciment, verre, briques…), la métallurgie et les industries extractives.

Une directive européenne de 2004 à appliquer

Or il se trouve que « l’exposition professionnelle à la silice est associée, de manière certaine, à plusieurs atteintes pulmonaires », en particulier la silicose. Le lien avec le développement du « cancer broncho-pulmonaire » est également « confirmé », tout comme le risque accru de contracter une « maladie auto-immune » (par exemple la polyarthrite rhumatoïde) ou des « pathologies respiratoires non malignes » telles que la tuberculose.

De 2001 à 2017, un peu plus 4 500 « problèmes de santé en relation avec le travail, associés à la silice » ont été recensés. Dans deux cas sur trois, il s’agissait d’un cancer du poumon ou d’une silicose.

Dès lors, des mesures s’imposent. Avec un préalable indispensable, insiste l’Anses : il faut désormais que la France applique une directive européenne de 2004 relative à « la protection des travailleurs » confrontés, dans leurs tâches, à des agents cancérogènes – ce qui n’est pas le cas, aujourd’hui. Autre recommandation : réviser les « valeurs limites » en vigueur pour les travailleurs, le seuil de 0,1 mg par m³ n’étant « pas suffisamment protect[eur] ».

Des préconisations sont également formulées pour « les particuliers » qui utilisent des matériaux contenant de la silice cristalline ou réalisent « des opérations de bricolage » (découpage de carrelage ou de béton, ponçage de mortier…) : pour eux, il pourrait être imaginé « de nouveaux moyens de communication et d’information » sur les risques encourus.