L’expert de l’ONU Moncef Kartas, détenu depuis fin mars en Tunisie sur des accusations d’espionnage, a été remis mardi 21 mai en liberté provisoire, a-t-on appris de source judiciaire. « La chambre d’accusation a décidé de la libération provisoire de Moncef Kartas », a déclaré à l’AFP le porte-parole du parquet, Sofiène Sliti, en insistant sur le fait qu’il restait « poursuivi par la justice tunisienne ». Interrogé sur le sujet, M. Sliti a par ailleurs affirmé que l’expert, pour lequel l’ONU réclamait la libération immédiate et l’abandon des poursuites, n’était pas sous le coup d’une interdiction de sortie de territoire.

« Nous sommes très encouragés par ce développement. Nous attendons avec impatience la confirmation de sa libération », a déclaré à la presse à New York un porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric. « Nous recherchons actuellement des informations complémentaires auprès du gouvernement [tunisien], notamment en ce qui concerne l’état d’avancement des procédures judiciaires engagées contre M. Kartas », a-t-il ajouté.

Membre d’un groupe de spécialistes chargés par l’ONU d’enquêter sur les violations de l’embargo sur les armes imposé à la Libye, M. Kartas, un Germano-Tunisien, était en détention depuis fin mars sur des accusations d’espionnage. Selon M. Sliti, il est poursuivi pour avoir « collecté des informations en relation avec le terrorisme de façon non officielle, ce qui constitue un crime dangereux ».

« Un gros problème »

Dans le cadre de cette enquête, a été découvert du matériel servant à contrôler le trafic aérien civil et militaire, « dont l’utilisation nécessite des autorisations », avait précisé la même source. Selon la défense de M. Kartas, l’un des principaux éléments à charge est un appareil « donnant accès aux données publiques concernant les vols d’avions civils et commerciaux », l’équivalent des informations diffusées par des sites comme Flightradar 24.

Cet appareil, un RTL-SDR, soumis à une autorisation en Tunisie, lui servait « uniquement pour la surveillance du trafic aérien à destination de la Libye, afin d’identifier les vols susceptibles d’être liés à des violations de l’embargo sur les armes », avait expliqué son avocate, Sarah Zaafrani. L’ONU, par la voix de son porte-parole, avait dénoncé la détention de cet expert, arguant de la validité de l’immunité diplomatique, contestée par Tunis.

Avec cette affaire, la Tunisie, candidate à un poste de membre non permanent du Conseil de sécurité de l’ONU pour la période 2020-2021, « a un gros problème », avait estimé une source proche de ce dossier. L’arrestation de M. Kartas est survenue au moment où les enquêteurs de l’ONU sont mobilisés sur la violation de l’embargo sur les armes en Libye, dont les cas se multiplient dans le cadre de l’offensive lancée le 4 avril par le maréchal Khalifa Haftar sur Tripoli. L’homme fort de l’est de la Libye et son Armée nationale libyenne (ANL) autoproclamée cherchent à conquérir la capitale, siège du gouvernement d’union nationale (GNA) reconnu par la communauté internationale.