L’ex-vice-chancelier autrichien Heinz-Christian Strache (FPÖ) lors d’une conférence de presse le 18 mai 2019 à Vienne. / Michael Gruber / AP

Heinz-Christian Strache a décidé de passer à l’offensive. Le vice-chancelier autrichien d’extrême droite, qui a démissionné le 18 mai, veut absolument démasquer les commanditaires du piège dans lequel il est tombé, ainsi que leur mobile. « Je ne vais pas lâcher l’affaire », a écrit l’ancien chef du FPÖ (Parti autrichien de la liberté) sur son compte Facebook, où le suivent encore 850 000 internautes. « La vérité est fille du temps. »

M. Strache a déposé, vendredi 24 mai, une plainte contre trois personnes qu’il soupçonne être impliquées dans l’affaire de la vidéo, sans préciser leur identité. Le FPÖ n’arrive pas à identifier la jeune femme séduisante qui s’est fait passer pour la nièce d’un oligarque russe, bien en cour au Kremlin et désireuse de financer le FPÖ, en échange de l’obtention de marchés publics.

Mais une semaine après que cette vidéo, tournée en juillet 2017 à Ibiza (Espagne) ait été rendue publique par les journaux allemands Süddeutsche Zeitung et Spiegel, Johann Gudenus, l’élu du FPÖ qui accompagnait M. Strache, a donné sa version des faits. Une agente immobilière de l’opulent premier arrondissement de Vienne, où les riches familles russes sont très présentes, lui a donné le contact d’un avocat, parce qu’il avait pour projet de vendre un domaine hérité récemment. Cet avocat, Monsieur M., a raconté à Johann Gudenus que l’une de ses connaissances avait entendu parler d’une oligarque fortunée qui pourrait être intéressée. Un premier contact a eu lieu en mars 2017 dans la capitale autrichienne entre M. Gudenus, cet avocat et sa connaissance, ainsi qu’avec la jeune femme.

Perquisition du domicile

La « connaissance » de Monsieur M. était en fait un détective privé munichois d’origine viennoise, Julian H. Au cours d’un entretien avec le site Internet oe24tv, l’ancien chef de Julian H., Sascha W., a confirmé avoir « tout de suite reconnu » son ex-salarié sur la vidéo. Ce détective privé autrichien a également certifié que Julian H. était très ami avec l’avocat, Monsieur M., qui n’a pas souhaité répondre aux questions du Monde, tout comme Johann Gudenus.

Sascha W., quand à lui, avait été poursuivi en justice, le 25 janvier 2016, par un constructeur ferroviaire. Selon des documents consultés par Le Monde, cette entreprise était à l’époque défendue par Monsieur M. La société accusait le détective de lui avoir volé des informations confidentielles, à savoir des certificats de douanes. Le parquet autrichien a ordonné une perquisition du domicile du détective privé dans la pittoresque petite ville autrichienne de Krems, située sur les bords du Danube, non loin de Vienne.

Les enquêteurs ont saisi 26 appareils électroniques et 400 000 documents, dont certains concernent une entreprise de sous-traitance bulgare. Mais le 2 novembre 2016, la justice a ordonné un non-lieu, estimant qu’aucune preuve de violation du secret des affaires n’avait pu être documentée au détriment de l’entreprise de construction ferroviaire.