LA LISTE DE LA MATINALE

Le soulèvement place Tiananmen à Pékin en 1989, la Naples miséreuse des années 1950, l’armée américaine en Europe pendant la seconde guerre mondiale : trois séries qui s’ancrent dans le passé, avec gravité, tendresse ou humour, mais sans nostalgie.

« Chimerica » : à la recherche de « l’homme au char »

Chimerica - Bande annonce - CANAL+
Durée : 01:00

Dans cette minisérie britannique, Lucy Kirkwood met en scène un photoreporter new-yorkais fictif, Lee Berger, qui, quelque trente ans après avoir pris le très célèbre cliché de l’homme qui se planta devant une colonne de chars et la mit à l’arrêt, près de la place Tiananmen, en 1989, part à la recherche de ce héros inconnu, « l’homme au char », persuadé qu’il est toujours vivant. Il s’engage dans une enquête en Chine mais aussi aux Etats-Unis (où l’homme aurait pu trouver refuge). Ce qui l’amène à un sombre constat, tant sur l’état du journalisme, en cette année 2016, que sur la marche du monde : la Syrie est à feu et à sang mais ne fait pas la « une » ; sévit en Chine une sourde mais redoutable répression dont personne ne semble se soucier ; et, contre toute prédiction, le Royaume-Uni vote en faveur du Brexit tandis que Trump est investi à la Maison Blanche…

Chimerica – contraction de « Chine » et « America » – mêle avec fluidité les époques et, surtout, l’aspect fresque historico-politique, à la caractérisation des personnages. Tout cela avant un retournement final qui prouve au photoreporter que, comme celui de l’ensemble de sa profession, son regard ne se portait pas dans la bonne direction.

Chimerica, minisérie créée par Lucy Kirkwood. Avec Alessandro Nivola, Cherry Jones, Terry Chen (GB, 2019, 4 × 60 min). Sur MyCanal et Canal+ Séries (SVoD).

« L’Amie prodigieuse » : une fiction radio après l’adaptation en série

L'amie prodigieuse - Bande annonce - CANAL+
Durée : 01:59

Créée en 2018 et toujours disponible sur MyCanal, l’adaptation télévisée du premier tome de la saga romanesque de l’Italienne Elena Ferrante (une tétralogie vendue à 10 millions d’exemplaires), L’Amie prodigieuse (Folio, 2016), vient de faire l’objet d’une fiction en dix épisodes, conçue par Victoire Bourgois pour France Culture.

L’Amie prodigieuse propulse l’auditeur dans l’Italie d’après-guerre, dans un quartier défavorisé de Naples. En ces années post-fascisme, l’on y suit la naissance de la complicité entre deux jeunes élèves, la docile Elena et la rebelle Lila, toutes deux douées pour les études. Une amitié mise à mal lorsque Elena, soutenue par son institutrice, parvient à aller au collège puis au lycée, tandis que Lila, la plus douée des deux, abandonne très vite l’école pour travailler dans l’échoppe de son père, cordonnier. Ce premier tome de la saga adapté en feuilleton suit les deux jeunes filles jusqu’à l’orée orageuse de leur entrée dans l’âge adulte.

L’Amie prodigieuse, traduction de l’italien par Elsa Damien et adaptation par Victoire Bourgois. Avec Amira Casar, Louise Orry-Diquéro (10 x 24 min). Podcast disponible sur Franceculture.fr et iTunes

« Catch-22 » : une satire trop peu piquante sur l’absurdité des guerres

Catch 22 - Bande Annonce - CANAL+
Durée : 01:09

Catch-22 est une minisérie adaptée du livre-culte de Joseph Heller, sorti en 1961 aux Etats-Unis (L’Attrape-Nigaud, 1964, Le Livre de poche), dans lequel l’auteur s’inspirait de son expérience pendant la seconde guerre mondiale pour signer une satire burlesque de la hiérarchie militaire et d’un capitalisme débridé.

Sur une bande-son jazzy à la Glenn Miller, on suit les tentatives drolatiques de John Yossarian (Christopher Abbott), surnommé « Yoyo », qui, basé sur l’île italienne de Pianosa, en 1944, en a plus qu’assez de cette guerre qui n’en finit pas de finir. Bombardier sur un B-25 de l’US Air Force, il n’a de cesse de mettre un terme à ses missions pour sauver sa peau et enfin rentrer chez lui.

En attendant cette délivrance constamment reportée par son supérieur hiérarchique, il tente pour le moins de rester au sol en se présentant à l’infirmerie sous toutes sortes de prétextes, notamment en tentant de se faire passer pour fou. Mais voilà, le « catch-22 », un article du règlement militaire, stipule que « quiconque veut se dispenser d’aller au feu n’est pas réellement fou »

En dépit de scènes comiques et de son impeccable interprétation, cette adaptation de Catch-22 produite par George Clooney manque de piquant, d’esprit de révolte et de sens de l’absurde pour faire oublier le modèle du genre que fut en son temps le film MASH, de Robert Altman (Palme d’or du Festival de Cannes 1970), puis son adaptation en une série devenue mythique (MASH, entre 1972 et 1983).

Catch-22, minisérie de Luke Davies et David Michôd, d’après le roman de Joseph Heller (EU, 2019, 6 × 50 min). Avec Christopher Abbott, Kyle Chandler, Daniel David Stewart, George Clooney, Hugh Laurie.