Pour la première fois, la justice a ordonné mardi 28 mai à l’Eglise de communiquer le dossier religieux d’un prêtre condamné pour pédophilie à une victime qui le réclamait.

Statuant en référé dans le cadre d’une action engagée au civil contre l’Eglise, le tribunal de Bourg-en-Bresse a ordonné à l’évêque du diocèse de Belley-Ars (Ain), Mgr Pascal Roland, de communiquer à la victime, dans un délai de quinze jours, « l’intégralité du dossier concernant Félix Hutin détenu par l’évêché ».

Cet ancien prêtre de 86 ans avait été condamné au civil en juillet 2015 – les faits étant prescrits sur le plan pénal – par le juge de proximité de Nantua qui l’avait reconnu responsable des agressions sexuelles subies par Jean-Yves Schmitt durant son enfance dans un lycée de Bourg-en-Bresse, où le religieux officiait comme aumônier dans les années 1960.

« C’est le signe que les mentalités changent »

La victime, aujourd’hui âgée de 67 ans, elle-même condamnée pour pédophilie par la suite, a engagé des poursuites judiciaires en France contre le Vatican, qu’il accuse d’avoir exfiltré le prêtre en Suisse dans les années 1970 quand ses agissements ont fait scandale dans l’Ain. A cette fin, il avait demandé une première fois au diocèse, à l’amiable, de lui communiquer le dossier du prêtre. Face au refus de l’évêque, il l’avait assigné devant le tribunal il y a quinze jours.

« C’est une première qui va faciliter le combat des victimes de prêtres pédophiles en leur donnant accès aux éléments de preuves qui sont souvent dissimulés par les évêchés », s’est félicité l’avocat du demandeur, Me Emmanuel Ludot. « On vient d’avancer d’un grand pas, c’est le signe que les mentalités changent et qu’on a désormais une politique judiciaire de transparence totale », a-t-il ajouté.