Manifestation contre le plan loup, à Lyon, le 9 octobre 2017. / Robert Pratta / REUTERS

Face à l’expansion du loup en France, l’Etat prévoit de faciliter les tirs, d’augmenter le nombre d’animaux pouvant être tués et de renforcer la protection des troupeaux. Mais ces mesures, présentées mardi 28 mai par le préfet d’Auvergne-Rhône-Alpes, chargé du dossier loup, ne satisfont ni les éleveurs ni les défenseurs de cet animal protégé.

Tous attendaient de connaître le nombre exact de loups adultes à la sortie de l’hiver, mais il faudra encore patienter jusqu’en juin. Seule certitude, le seuil de 500 adultes prévu par le plan loup en 2023, qui correspond au seuil de « viabilité démographique », semble déjà avoir été atteint. Résultat, le gouvernement doit revoir sa copie.

3 674 attaques en 2018

L’expansion du Canis lupus, classé vulnérable sur la liste rouge française de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), est plus rapide que prévue. Sa population a augmenté d’environ 20 % en 2018, alors que le niveau de tirs s’est élevé à plus de 12 %, selon l’ONCFS.

Ces carnivores, éradiqués dans les années 1930 et revenus naturellement par l’Italie dans les années 1990, se concentrent essentiellement dans les Alpes, le Sud-Est et l’Est.

En 2018, 3 674 attaques ont eu lieu contre plus de 12 500 animaux, principalement des ovins. Ces attaques se concentrent sur les Alpes-Maritimes, les Alpes-de-Haute-Provence et la Savoie. L’été, des centaines de milliers de bêtes vont dans les alpages.

Gerry Broome / AP

La nouvelle mouture du plan loup prévoit plusieurs mesures :

  • La plus symbolique est le relèvement du pourcentage de loups pouvant être tués, de 10-12 % à 17-19 %, comme annoncé en mars par Emmanuel Macron.
  • Un projet d’arrêté prévoit de revoir les conditions dérogatoires permettant d’effaroucher ou de tuer des loups, même si l’espèce est protégée au niveau français et européen.
  • L’Etat finance actuellement des dispositifs de protection dans les zones de prédation (parcs électrifiés, chiens, gardiennage par des bergers). Il existe deux types de zones en fonction de la fréquence des attaques. Il est prévu d’en ajouter une troisième, un « cercle 0 » pour les communes dans lesquelles 15 attaques ou plus ont eu lieu en moyenne sur la période 2016-2018.
  • Dans ces foyers de prédation, les mesures de protection seront renforcées pour permettre un gardiennage 24 heures sur 24 des troupeaux par des bergers.
  • Les conditions dans lesquelles sont effectués les tirs dans certaines zones sont facilitées, pour les rendre plus efficaces, et des tirs pourront avoir lieu dès le 1er juillet, au lieu de septembre auparavant.
  • Les ministères de la transition écologique et de l’agriculture entendent « revaloriser » le montant d’indemnisation pour les animaux d’élevage attaqués par le loup.
  • Dans les zones de colonisation, les éleveurs auront une aide financière pour se doter de chiens de berger.
  • Les démarches administratives pour le financement de mesures de protection et les indemnisations en cas d’attaques seront simplifiées.
  • En Aveyron, Tarn, Hérault et Lozère, où est produit le Roquefort, une « zone difficilement protégeable » a été définie. Les procédures d’autorisation de tirs y sont simplifiées, même en l’absence de mesures de protection des troupeaux, une « gestion différenciée » que la Fédération nationale ovine (FNO) rejette.

« Un processus de régulation de l’espèce »

Pour la FNO, la FNSEA ou encore la Fédération nationale bovine (FNB), « le compte n’y est toujours pas », selon un communiqué commun. Ils réclament la suppression du plafond de prélèvement, la possibilité pour les éleveurs de tirer « sans conditions », ainsi que « le prélèvement de meutes entières », pour aboutir à « zéro attaque ».

Pour les associations environnementalistes, multiplier les tirs n’est pas la bonne solution. « Tout ce qui concerne la protection des troupeaux n’avance pas », déplore Bertrand Sicard, de l’association de protection des grands prédateurs Ferus. Il demande une évaluation de l’efficacité des tirs, pour savoir s’ils peuvent perturber la structure sociale des loups en meute et leur stratégie de chasse.

« On rentre dans un processus de régulation de l’espèce », dénonce Marie-Paule Thiersant, de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), associée en tant qu’ONG aux consultations, un processus incompatible selon elle avec le statut d’espèce protégée.

Comment le loup a fait son retour en France
Durée : 05:38