France 5, dimanche 2 juin à 22 h 35, documentaire

Il n’est pas donné à tout le monde de rendre passionnante à l’antenne une problématique a priori peu excitante pour le grand public. Mais lorsque vous donnez une caméra et un micro à Serge Moati, il en fait généralement bon usage et réussit, la plupart du temps, à vous passionner pour son sujet. C’est le cas de son dernier documentaire, consacré à Force ouvrière et plus précisément à la crise profonde que le syndicat a traversé ces derniers mois. Avec Jean-Claude Mailly, qui présida FO durant quatorze ans (2004-2018), Moati réussit, comme souvent, en douceur mais non sans malice, à fendre l’armure de son interlocuteur et, parfois, révéler des blessures enfouies.

Du positionnement délicat à tenir, entre contestataires estampillés CGT et réformistes version CFDT, Mailly raconte l’histoire de son double septennat à la tête d’un syndicat qui lui tient d’autant plus à cœur que son arrière-grand-père, Henri Mailly (1877-1965), surnommé « le Jaurès des mineurs », y militait déjà, tout comme son grand-père et son père. Devenu permanent de FO en 1981, dans un syndicat dirigé à l’époque par André Bergeron, Jean-Claude Mailly deviendra proche de Marc Blondel, patron fort en gueule de l’organisation à partir de 1989.

Traitre à la cause

Formé à bonne et rude école, il se hissera à sa tête en 2004. Bataillant dans la rue contre le CPE du gouvernement Villepin en 2006, la réforme Fillon des retraites (2010) ou la loi travail de Myriam El Khomri (2016), Mailly terminera son septennat dans une position inconfortable : celle du traître à la cause. La raison ? Sa décision de négocier avec la ministre du travail, Muriel Pénicaud, plutôt que de continuer la lutte dans la rue comme avant.

La suite de l’histoire FO est pleine de bruits et de fureur. Un congrès violent à Lille en avril 2018, un successeur désigné depuis longtemps (Pascal Pavageau) qui tiendra à peine six mois avant de démissionner à la suite de révélations du Canard enchaîné sur un fichier mis en place pour surveiller des dizaines de cadres. Sans oublier une enquête parue en novembre 2018 dans Le Parisien sur les dérives financières du syndicat, salaires confortables et notes de frais salées à l’appui. FO a-t-il encore un avenir ? « J’y crois ! », affirme Mailly qui résume ce qu’a été et ce que doit être la position du syndicat si cher à son cœur : « Ni béni oui-oui ni béni non-non ! »

[EXTRAIT] FO - un syndicat par temps de crise - 02/06/2019
Durée : 01:33

FO, un syndicat par temps de crise, de Serge Moati (Fr., 2019, 52 min). www.france.tv/france-5