Voix d’orientation. Le Monde Campus et La ZEP s’associent pour faire témoigner lycéens, étudiants et jeunes diplômés sur leurs parcours d’orientation. Dans le cadre d’ateliers d’écriture, ces jeunes racontent, avec leurs mots, leurs parcours et leurs cheminements individuels. Aujourd’hui, Sabri, 18 ans, témoigne de la difficulté de combiner travail salarié et études au lycée.

La Zep

Je suis lycéen en terminale STMG, à Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines. Cette année, j’ai dû prendre un travail pour participer aux frais de ma famille et me payer le permis et le code. Et j’ai eu du mal à gérer cette situation.

A mon entrée en terminale, en septembre, je touchais déjà une bourse, mais ce n’était pas assez – je ne sais pas trop combien, c’est ma mère qui gérait ça. En plus ils étaient toujours en retard sur les versements, alors que ces sommes étaient très importantes pour nous. Tous mes grands frères sont partis de la maison, il ne reste que moi et ma mère. L’un d’eux nous aide, mais il ne peut pas toujours, et ma mère ne peut déjà plus travailler.

J’ai donc pris un travail de préparateur-livreur dans le drive d’un supermarché. J’étais à temps partiel, du fait de mes études au lycée. Je touchais peu, environ 500 euros par mois. J’en donnais une partie à ma mère pour les courses ou autres charges, puis je gardais juste ce qu’il fallait pour me payer le permis. Du coup, il ne me restait pas grand-chose pour moi – juste assez pour sortir manger dehors deux ou trois fois par semaine.

Peu à peu, j’ai été un peu dépassé par le code, les bacs blancs, l’orientation scolaire, les cours, le travail et ma vie sociale. Je finissais le lycée, j’allais direct au travail jusqu’à 20 h 30, puis je rentrais, je mangeais, je me douchais et j’allais dormir. J’ai commencé à sécher les cours, pour me reposer ou passer du temps avec mes proches. C’était un moyen de ne plus penser à rien, de me vider la tête.

Des reproches de toutes parts

Au travail, je me prenais des réflexions : « T’es fatigué alors que t’es à temps partiel ! » Cela m’a vite soûlé, parce qu’ils ne connaissaient pas ma vie, et que je n’avais pas envie de me justifier, ni de leur raconter.

Récemment, j’ai trouvé ce que je voulais faire après mon bac. Je vais m’engager dans l’armée. Et j’ai réfléchi. J’ai décidé de me reconcentrer sur les cours. J’ai préparé ma lettre de démission de mon travail, pour avoir plus de temps pour préparer le bac. Je vais en cours et j’ai arrêté de sécher. Grâce à ce que j’ai mis de côté jusqu’à maintenant, je peux encore aider ma famille, du moins jusqu’à mon bac, que je passe le mois prochain.

Finalement, je trouve que l’argent que j’ai gagné cette année ne valait pas la perte de temps. Je trouve injuste qu’à seulement 18 ans, encore au lycée, j’ai dû travailler pour subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille.

Ma situation n’a pas été prise en compte par le lycée. En entreprise, c’était pareil, on ne m’a pas valorisé en tant que salarié responsable. Les gens, au travail, m’ont pris à la légère, me voyaient encore comme un gamin.

La Zone d’expression prioritaire (ZEP) accompagne la prise de parole des 15-30 ans

La Zone d’expression prioritaire (ZEP) est un dispositif d’accompagnement à l’expression des jeunes, dans le cadre d’ateliers d’écriture animés par des journalistes professionnels. Organisés dans des lycées, universités, associations étudiantes ou dans des structures d’insertion, ces jeunes témoignent de leur quotidien et de l’actualité qui les concernent.

Tous leurs récits sont à retrouver sur Le Monde Campus et sur la-zep.fr.

La zone d’expression prioritaire (ZEP) est un dispositif d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans par des journalistes professionnels. / ZEP