Des forces de sécurité bloquent les accès à la place Tiananmen, à Pékin, le 4 juin 2019. / MATHEW KNIGHT / AFP

Un anniversaire sous silence. Ce mardi 4 juin marque les trente ans de la répression sanglante des manifestations de la place Tiananmen, à Pékin, mais le régime fait son possible pour effacer l’événement des mémoires. Et comme chaque année en prévision de l’anniversaire du 4 juin, Pékin a arrêté ou éloigné des militants des droits de l’homme ainsi que des proches des victimes.

L’Union européenne a déploré mardi ce silence des autorités chinoises et réclamé la « libération immédiate des défenseurs des droits de l’homme et des avocats détenus et condamnés pour ces événements ou pour leurs activités en faveur de l’Etat de droit et de la démocratie ». La cheffe de la diplomatie de l’UE, Federica Mogherini, a cité notamment « Huang Qi, Gao Zhisheng, Ge Jueping, le pasteur Wang Yi, Xu Lin et Chen Jiahong ».

« Ils ont tiré sur tout ce qui bougeait » : Le récit du massacre de Tiananmen dans « Le Monde » du 6 juin 1989

« Le nombre exact de personnes décédées et détenues le 4 juin et lors de la répression qui a suivi n’a jamais été confirmé et pourrait ne jamais être connu », a souligné Mme Mogherini dans un communiqué.

« Il est important pour les générations futures et pour la mémoire collective de reconnaître ces événements, ainsi que les personnes tuées, détenues ou portées disparues à l’occasion des manifestations de la place Tiananmen. »

Passe d’armes avec les Etats-Unis

Toujours sur le plan diplomatique, Pékin a réagi avec fureur à des commentaires du secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, qui a rendu hommage « aux héros du peuple chinois » tombés dans la nuit du 3 au 4 juin 1989.

« Ces vociférations démentes et ce bafouillage ridicule ne pourront que terminer dans les poubelles de l’histoire », a lancé devant la presse le porte-parole de la diplomatie chinoise, Geng Shuang. Ces propos, réservés à la presse étrangère, n’avaient pas filtré mardi en fin de journée dans les médias chinois, qui continuaient à respecter scupuleusement le « tabou » de Tiananmen.

La télévision publique CCTV a ouvert son journal de la mi-journée par la présentation du logo officiel marquant un autre anniversaire : les soixante-dix ans de la fondation de la République populaire, qui sera célébré en grande pompe le 1er octobre.

Veillée aux chandelles à Hongkong

Veillée aux chandelles à Hongkong, le 4 juin 2019. / Vincent Yu / AP

Sur place, les accès à l’immense esplanade du cœur de Pékin, étaient très étroitement surveillés mardi. Une immense foule était cependant attendue mardi soir pour la traditionnelle veillée aux chandelles organisée annuellement à Hongkong, le territoire autonome étant le seul endroit de Chine où une telle commémoration peut avoir lieu. Malgré une baisse de la participation ces dernières années, des dizaines de milliers de personnes devraient être présentes à cette manifestation, qui demande la justice pour les victimes et une démocratisation du pays.

De mi-avril à début juin 1989, des millions d’étudiants, rejoints par des ouvriers et des intellectuels, s’étaient mobilisés pour demander des changements démocratiques et dénoncer la corruption et l’inflation. Des soldats et des blindés avaient repris le contrôle de Pékin en faisant feu sur les manifestants et les simples civils présents le long des avenues et aux abords de la place Tiananmen.

Trente ans plus tard, le régime ne semble pas prêt à modifier son verdict sur les manifestations du « Printemps de Pékin ». Le ministre de la défense, Wei Fenghe, a estimé dimanche que l’intervention de l’armée avait été une décision « correcte », permettant d’assurer « la stabilité et le développement » de la Chine.

Aux origines du « massacre de Tiananmen », 30 ans après
Durée : 08:34