La justice va-t-elle ouvrir une enquête sur l’affaire Alstom-General Electric (GE) ? Le député Olivier Marleix (Les Républicains), qui l’avait saisie en janvier pour qu’elle enquête sur les circonstances de la vente du pôle énergie d’Alstom à l’américain GE en 2014, a été auditionné sur son signalement, a-t-on appris mercredi 5 juin de source judiciaire.

Il a été entendu par les enquêteurs de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) de la police judiciaire à la demande du parquet de Paris qui « souhaitait lui faire préciser les termes de sa dénonciation », selon cette source, qui confirmait une information de L’Obs. « Son signalement et ses déclarations sont désormais en cours d’analyse au parquet qui étudie les suites à donner », a-t-elle ajouté.

« Pacte de corruption »

Dans une lettre de quatre pages datée du 14 janvier et adressée au procureur – dont Le Monde avait eu connaissance –, Olivier Marleix s’interroge sur deux points. D’abord, l’absence de poursuites pénales contre Alstom en France alors que l’entreprise a reconnu des faits de corruption dans plusieurs pays entre 2000 et 2011. Puis, il émet l’hypothèse, dans le cadre de la vente de la branche énergie d’Alstom à GE, d’un possible « pacte de corruption » (c’est le terme qu’il emploie), au bénéfice du ministre de l’économie en poste lors de la signature finale du rachat, le 4 novembre 2014, Emmanuel Macron.

« Depuis la fin de la commission d’enquête parlementaire en avril 2018, ces questions me taraudent. Il faut y répondre et c’est pourquoi je transmets au parquet l’ensemble des informations et des documents en ma possession », expliquait alors M. Marleix.

Lire l’interview de Fédéric Perucci : L’ex-cadre qui relance l’affaire Alstom

Dans un livre publié en début d’année, Le Piège américain (éditions JC Lattès), Frédéric Pierucci, qui a été président de la filière chaudière d’Alstom, revient sur cette vente et sur son arrestation en 2013 à New York par le FBI pour une affaire de corruption en Indonésie. Pour lui, il ne fait aucun doute que les deux affaires sont liées.

« Toute cette histoire, mon incarcération, l’enquête du DoJ [Department of Justice – ministère de la justice] lancée depuis 2010, n’avait-elle qu’un but : s’emparer d’Alstom en faisant pression sur Patrick Kron [ancien PDG d’Alstom] ?, se demande-t-il dans une interview au Monde. Jusqu’alors, je croyais à une simple opération anticorruption qui allait se solder, une nouvelle fois, par une amende élevée pour un groupe français. Ce pourrait donc être bien pire. »