Alfredo Rodríguez et Pedrito Martínez / Anna Webber / Mack Avenue

Le percussionniste Pedrito Martínez fait partie de ces musiciens qui vous obligent à repenser les possibilités des instruments - tout en vous faisant vous demander s’il y a vraiment quelque chose qu’ils ne sachent faire. Il joue des congas, des tambours batá et des bongos avec une facilité et une fluidité à couper le souffle. Il peut tout chanter, des chants yoruba à Quizás Quizás Quizás. Il sait danser. Et réussit à transformer comme par magie un charleston et une caisse claire (pas de baguettes, tout est joué avec les mains et avec les pieds) plus un tambour cajón en batterie rock.

Sur les congas et les batá, Martínez est capable de tout exécuter, du plus délicat pit-a-pat du bout des doigts jusqu’à la plus explosive des rafales. Mais ce qui impressionne plus que tout, c’est sa versatilité rythmique, du simple beat rock aux complexes rythmes asymétriques de « Duologue », en passant par toutes les sortes de claves son et rumba d’une chanson comme El Punto Cubano. Sans parler du capital sympathie et du charisme certain qui émane de sa personne.

En tant que pianiste, Rodríguez possède une merveilleuse touche mélodique pour les aspects les plus romantiques de titres comme La Cosa Amor, mais peut aussi fournir si nécessaire une vitesse d’exécution et une puissance de feu incroyables.

« Nous avons été pendant des années physiquement éloignés de Cuba mais nous y étions tous les jours par la pensée. »

En d’autres mots, il y a une proximité évidente entre le pianiste et le percussionniste qui apparaît tout particulièrement dans la chanson Yo Volveré (Je reviendrai), qui décrit un sentiment qu’ils ont tous deux. Comme l’explique Rodríguez, « Nous avons été pendant des années physiquement éloignés de Cuba mais nous y étions tous les jours par la pensée. »

Quincy Jones a eu une influence criante dans la conception du projet sur lequel il a eu la main mise en tant que producteur. C’est lui qui a eu l’idée que le duo devait enregistrer une version rumbera du Thriller de Michael Jackson. Mais je dois avouer que j’ai eu le cœur serré d’entendre que l’une des premières notes du spectacle fut la voix de Rodríguez dans un vocodeur à la Jacob Collier, soulevant la question de savoir si même pour un génie comme Quincy Jones, la poussière magique qu’il répand sur un projet pouvait produire un résultat standardisé.

Mais il n’y a pas d’autres talents protéiformes comme ces deux-là. Ils ont chacun de leur côté franchi toutes les étapes, du statut de jeune talent à celui d’artiste reconnu. Il semble évident qu’ils apprécient la compagnie l’un de l’autre et qu’ils ont tout à gagner à faire un bout de chemin ensemble. La standing-ovation que leur a offerte un Ronnie Scott’s plein à craquer fut sans nul doute la moindre des surprises de la soirée.

Un contenu de cette page n'est pas adapté au format mobile, vous pouvez le consulter sur le site web

Sebastian Scotney, directeur de publication du site britannique London Jazz News. Article original publié en anglais sur TheArtsDesk.com.

Alfredo Rodríguez et Pedrito Martínez : Duologue (2019, Mack Avenue)

Alfredo Rodríguez et Pedrito Martínez en concert le 6 juillet 2019 au Jazz Mix de Jazz à Vienne et le 6 août 2019 à Jazz In Marciac.