Un homme soudanais tient un drapeau de son pays, à Khartoum, le 5 juin 2019. / REUTERS

« Le mouvement de désobéissance civile commencera dimanche et ne se terminera que lorsqu’un gouvernement civil aura été annoncé » : dans un communiqué publié samedi 8 juin, l’Association des professionnels soudanais (SPA), acteur majeur de la contestation civile au Soudan depuis le début du mois d’avril, a encouragé la population à entamer un mouvement de désobéissance civile pour que le Conseil militaire de transition abandonne son emprise sur le pouvoir.

Cet appel, le premier de la sorte depuis le début des manifestations et la destitution du président Omar Al-Bachir, le 11 avril, intervient au lendemain de la visite à Khartoum du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, venu en médiateur entre la contestation et le Conseil militaire de transition.

Il survient aussi cinq jours après la violente dispersion par les forces de sécurité d’un sit-in organisé depuis le 6 avril devant les quartiers généraux de l’armée à Khartoum, dans le prolongement du mouvement de contestation déclenché en décembre. Qualifiée de « massacre » par la contestation – au moins 108 personnes sont mortes – cette dispersion a été suivie d’une vague de répression cette semaine. Selon des habitants, un climat de « terreur » s’est emparé de la capitale.

Pour la SPA, la désobéissance civile constitue « un acte pacifique capable de mettre à genoux le plus puissant arsenal d’armes au monde ». Cette nouvelle forme d’action intervient après deux jours de grève générale, les 28 et 29 mai, pour faire pression sur l’armée. La forme que prendra cette « désobéissance civile » n’a pas été précisée, alors que les rues de Khartoum sont quasi désertes depuis lundi en raison de la répression.

Négociations interrompues depuis le 20 mai

Samedi encore, les rideaux de fer de la plupart des magasins étaient baissés dans la capitale soudanaise en ce dernier jour de vacances de la fête musulmane du Fitr, qui marque la fin du mois de jeûne de ramadan. Si la circulation avait légèrement repris, peu de piétons étaient visibles dans les rues. Des barricades de briques coupaient certaines routes des quartiers de Bahri et Burri, deux hauts lieux de la contestation à Khartoum. Elles ont été érigées par les manifestants pour notamment, disent-ils, se protéger des forces de sécurité.

Dans d’autres rues, ces barrières de fortune étaient retirées à la main, brique par brique, par des soldats de l’armée régulière et par des hommes des Forces de soutien rapide (RSF). Ces paramilitaires sont accusés par la contestation d’être les principaux auteurs de la répression du mouvement depuis le 3 juin.

Durant sa visite vendredi, le Premier ministre éthiopien avait appelé à « faire preuve de courage et de responsabilité en prenant des actions rapides vers une période de transition démocratique et consensuelle dans le pays », après une rencontre avec le président du Conseil militaire au pouvoir, le général Abdel Fattah al-Burhane, et plusieurs chefs de la contestation.

Les militaires avaient entrepris des négociations avec les chefs de la contestation autour de la transition post-Béchir, qui ont toutefois été suspendues le 20 mai, chaque camp voulant en prendre la tête. Durant la visite du Premier ministre éthiopien, les généraux se sont dits « ouverts aux négociations » mais l’ALC a opposé des conditions, dont une enquête internationale sur le « massacre » du sit-in.