Qui succédera à Theresa May ? Jeudi 13 juin, les députés conservateurs britanniques ont voté une première fois pour sélectionner sept candidats parmi les dix candidats au poste de chef du Parti conservateur britannique. Sans surprise, c’est l’ancien maire de Londres et fervent partisan du Brexit Boris Johnson qui est arrivé largement en tête du premier tour de scrutin, réunissant sur son nom les voix de 114 des 313 députés conservateurs britanniques ayant pris part au vote.

Trois des dix candidats, eux, n’ont pas obtenu les 16 voix nécessaires pour se maintenir et sont éliminés de la course : il s’agit de Mark Harper, d’Andrea Leadsom, ancienne ministre chargée des relations avec le Parlement, et d’Esther McVey. Exit donc les deux tenantes du « no deal », défendant une rupture nette avec l’UE.

Les sept candidats encore en lice seront soumis à un deuxième tour, mardi prochain, où le seuil passera à 32 voix. D’autres tours de scrutin sont programmés les mercredi et jeudi suivants. Les deux derniers candidats encore en lice seront ensuite départagés par les adhérents du parti conservateur, avec résultat de ce vote par voie postale attendu dans le courant de la semaine du 22 juillet.

Le vainqueur accédera du même coup au 10 Downing Street, le poste revenant au chef de la formation qui réunit une majorité parlementaire suffisante pour gouverner. Il aura la délicate mission de mener à bien la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, ce que Theresa May n’a pas réussi, contrainte de repousser au 31 octobre la date du Brexit, qui devait avoir lieu le 29 mars.

Tour d’horizon des positions des sept candidats sur le Brexit :

Les avocats d’un « no deal » le 31 octobre

  • Le favori, Boris Johnson : 114 voix

Trois ans après le référendum du 23 juin 2016, par lequel les électeurs britanniques ont voté à 52 % pour une sortie de l’Union européenne, Boris Johnson, 54 ans, se rapproche du 10, Downing Street. Fort de son score et de sa popularité parmi les militants, il est désormais donné à 70 % vainqueur de la « primaire » par les bookmakers.

« Merci à mes amis et collègues conservateurs et du parti unioniste pour votre soutien. Je suis ravi de remporter ce premier tour, mais nous avons un long chemin à parcourir », a réagi Boris Johnson.

Ancien ministre des affaires étrangères de Theresa May, il n’a eu de cesse de critiquer sa stratégie dans les négociations avec Bruxelles, avant de quitter le gouvernement. Il est partisan d’un départ de l’UE le 31 octobre, accord renégocié ou pas. Johnson menace également de ne pas payer la facture du Brexit – un montant évalué entre 40 et 45 milliards d’euros – si l’UE n’accepte pas de meilleures conditions pour son pays. M. Johnson prévoit aussi des baisses d’impôts, qui seraient en partie financées par l’argent mis de côté dans l’éventualité d’un Brexit sans accord, selon le Daily Telegraph. Une renégociation semble cependant improbable. Les Vingt-Sept ont répété qu’ils ne toucheraient pas à l’accord de sortie de l’UE conclu en novembre entre Londres et Bruxelles, et rejeté à trois reprises par les députés britanniques.

  • Dominic Raab : 27 voix

Nommé ministre du Brexit en juillet 2018, Dominic Raab a démissionné quatre mois plus tard, opposé à l’accord de Mme May. Ancien avocat spécialisé en droit international, ce député ultralibéral et eurosceptique de 45 ans est l’une des figures de la nouvelle garde des conservateurs.

  • Sajid Javid : 23 voix

Nommé en 2018 à la tête du ministère de l’intérieur, Sajid Javid, 49 ans, est un ancien banquier d’affaires, fils d’un chauffeur de bus pakistanais. Il s’était prononcé contre le Brexit au moment du référendum de juin 2016, mais défend désormais des positions eurosceptiques. Il est soutenu par la populaire dirigeante du Parti conservateur en Ecosse, Ruth Davidson.

Les opposants à un « no deal » le 31 octobre

  • Le principal rival de Johnson, Jeremy Hunt : 43 voix

Le ministre des affaires étrangères, 52 ans, avait soutenu le maintien dans l’UE avant de changer d’avis, déçu par l’approche « arrogante » de Bruxelles dans les négociations. Si cet ancien homme d’affaires, parlant couramment le japonais, a dit qu’un « no deal était mieux que pas de Brexit », il estime désormais que chercher à obtenir une sortie sans accord en octobre serait « un suicide politique » pour les conservateurs au pouvoir et pense pouvoir renégocier avec l’UE.

A la suite du vote de jeudi, Hunt a ainsi averti ses collègues des Communes que les enjeux avaient « rarement été aussi élevés » dans l’histoire du Royaume-Uni. « Cette période grave réclame un dirigeant sérieux », a-t-il tweeté.

  • Michael Gove : 37 voix

Ministre de l’environnement et pourfendeur du plastique, cet eurosceptique de 51 ans a joué le rôle de caution pour les partisans du Brexit dans le gouvernement May. Si Bruxelles accepte de renégocier, il est prêt à demander un nouveau report du Brexit pour éviter une sortie sans accord le 31 octobre.

Considéré comme l’un des favoris, il fait l’objet d’une polémique pour avoir admis avoir consommé de la cocaïne il y a vingt ans. Assailli de questions à ce sujet au lancement de sa campagne, le candidat a dit « regretter » cette « erreur », et assuré qu’il croyait toujours en ses chances : « Je suis là pour gagner », a-t-il affirmé.

Les anti- « no deal »

  • Matt Hancock : 20 voix

Ancien économiste de la Banque d’Angleterre, le ministre de la santé Matt Hancock, 40 ans, a d’abord été chargé du portefeuille du numérique.

  • Rory Stewart : 10 voix

Le ministre du développement international, Rory Stewart, 46 ans, a affiché son optimisme sur la suite de sa candidature, malgré son faible nombre de voix. « Il est de plus en plus évident, a-t-il dit, que c’est moi contre Boris. » L’ancien secrétaire au Foreign Office, qui lançait officiellement sa campagne mercredi, a promis de respecter l’échéance du 31 octobre pour la rupture avec l’Union européenne. « Après trois ans et le report de deux dates limites, nous devons quitter l’UE le 31 octobre », a-t-il déclaré.

Rory Stewart est notamment connu pour avoir servi en Irak comme gouverneur adjoint de la coalition après l’invasion américaine en 2003 et traversé seul l’Afghanistan pendant un mois en 2002.

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