Panneaux indiquant la valeur des indices boursiers, le 14 juin à Tokyo. / Eugene Hoshiko / AP

Le golfe Arabo-Persique s’embrase, et le marché pétrolier semble regarder ailleurs. Jeudi, après l’annonce de l’attaque contre deux tankers dans le golfe d’Oman, le cours du baril de brent a été temporairement secoué, mais il est rapidement revenu autour de 61 dollars, retrouvant son niveau de la veille. Vendredi, la tendance était similaire. Autrement dit : la violence de ces attaques dans une zone cruciale pour le trafic pétrolier mondial n’a, pour l’heure, pas d’impact significatif sur le marché.

Dans le détroit d’Ormuz, qui mène au golfe d’Oman, circulent pourtant près de 20 % du pétrole mondial et 30 % du gaz naturel liquéfié (GNL) : une partie importante des productions saoudienne, iranienne, irakienne, émiratie et qatarie est exportée à travers ce passage large de 40 kilomètres entre l’île iranienne d’Ormuz et le sultanat d’Oman. La moitié des réserves mondiales de pétrole se trouvent dans cette région, dans laquelle plus de 2 400 tankers naviguent chaque année, sous la surveillance étroite de la Ve flotte américaine de l’US Navy.

Les besoins colossaux de la Chine

Depuis que Donald Trump a déchiré l’accord sur le nucléaire iranien en mai 2018, Téhéran menace à mots couverts de bloquer le détroit. Mais la panique ne s’est pas emparée des marchés à la suite des événements de jeudi. « La vraie question à se poser est : le marché pétrolier pense-t-il que l’Iran a les moyens d’interrompre le transport de pétrole dans le golfe Persique ? La réponse, pour l’instant, semble être que non. Mais nous verrons », a ainsi analysé sur Twitter la chercheuse et consultante Ellen Wald. Autrement dit : les tradeurs et les acheteurs de pétrole ne semblent pas miser sur un durcissement de la situation.

D’autant que les préoccupations du secteur sont plutôt tournées vers… les Etats-Unis. « Le marché regarde ailleurs pour l’instant, à cause des inquiétudes sur la guerre commerciale », note Helima Croft, analyste chez RBC Capital.

De fait, ces événements dans le golfe d’Oman interviennent alors que les prix du baril traversent une nouvelle période de turbulences. Alors que les cours étaient restés relativement stables depuis plusieurs mois, entre 60 et 70 dollars, ils sont brutalement redescendus fin mai autour de 60 dollars.

La demande pétrolière mondiale est tirée fortement par les besoins colossaux chinois. Or le durcissement des positions de Washington et de Pékin dans la bataille commerciale commence à peser sur la croissance chinoise, et donc sur sa demande en énergie.

Un autre élément crucial entraîne aussi les cours à la baisse : la hausse fulgurante de la production de pétrole de schistes américain, qui ne cesse de dépasser les prévisions. Depuis plusieurs mois, les Etats-Unis produisent plus de 12 millions de barils par jour, renforçant leur position de premier producteur mondial. Un sujet qui sera, tout comme les tensions dans le golfe d’Oman, au menu de la prochaine réunion des pays de l’OPEP, dont l’Arabie saoudite et l’Iran, fin juin, à Vienne.