• Sandrine Piau
    Si j’ai aimé

    Mélodies avec orchestre de Saint-Saëns, Bordes, Berlioz, Massenet, Dubois, Vierne, Guilmant, Martini. Œuvres orchestrales de Pierné, Duparc, Massenet, Godard. Sandrine Piau (soprano), Le Concert de la loge, Julien Chauvin (violon et direction).

Pochette de l’album « Si j’ai aimé », par Sandrine Piau (soprano), Le Concert de la loge, Julien Chauvin (violon et direction). / ALPHA / OUTHERE MUSIC

S’il est une artiste en son zénith, c’est bien Sandrine Piau, dont le soprano ductile et fruité, la subtile maîtrise du phrasé, l’art prosodique tendent à un point de perfection. Attente, désir, passion, douleur, réminiscences : plus qu’un bouquet de violettes, ce passionnant parcours offre à l’amour quinze pièces qui mêlent aux raretés et premières discographiques quelques œuvres connues (deux extraits des Nuits d’été, de Berlioz). Au sommaire, de rares et belles mélodies de Saint-Saëns (Extase, Papillons), Massenet (Le Poète et le Fantôme, Aimons-nous…), Vierne, Dubois et surtout Charles Bordes, dont la Promenade matinale s’accompagne plus habituellement du piano. Ranimées par les musiciens de Julien Chauvin, quelques pages orchestrales de Duparc, Massenet et Godard distillent leurs parfums subtils ou enivrants. Marie-Aude Roux

1 CD Alpha/Outhere Music.

  • Kaija Saariaho & Jean-Baptiste Barrière
    Ekstasis

    Raphaële Kennedy (voix), Aliisa Neige Barrière (violon) et Camilla Hoitenga (flûte)

Pochette de l’album « Ekstasis », avec des œuvres de Kaija Saariaho et de Jean-Baptiste Barrière. / CYPRÈS

Si Jean-Baptiste Barrière et Kaija Saariaho apparaissent rarement l’un sans l’autre à l’occasion d’un concert, leurs musiques ne voisinent pas souvent à l’affiche d’un programme, comme sur ce CD à la conception sophistiquée. Mêmes effectifs (de type solo plus électronique), mêmes interprètes (parmi lesquels la fille du couple, Aliisa Neige Barrière) et même propension à la confidence intimiste dans les trois œuvres de chaque compositeur. Celles de Saariaho (écrites dans les années 1990) témoignent d’une exceptionnelle qualité de déploiement. Tissage arachnéen pour Nocturne, amplification spatialisée pour NoaNoa et révolutions enchanteresses pour Lonh. Plus récentes (2003-2014), celles de Barrière (le virevoltant Crossing the Blind Forest, l’envoûtant Violance et le pénétrant Ekstasis) révèlent un goût pour la projection du geste vocal ou instrumental qui, avant même de visionner le Blu-ray couplé au CD (même programme, avec images), assure que le musicien se double d’un authentique metteur en scène. Pierre Gervasoni

1 CD et 1 Blu-ray Cyprès.

  • Fred Hersch & The WDR Big Band
    Begin Again

Pochette de l’album « Begin Again », de Fred Hersch et The WDR Big Band. / PALMETTO RECORDS / BERTUS DISTRIBUTION

Pianiste chez qui la manière impressionniste prime souvent, dans les compositions et leur interprétation, le plus souvent dans la forme du solo ou du trio, l’Américain Fred Hersch bénéficie dans cet album des arrangements de Vince Mendoza à la tête du WDR Big Band (cinq saxophonistes jouant à l’occasion de la flûte et de la clarinette, quatre trompettistes, autant de trombonistes, un guitariste et le duo rythmique basse et batterie). De quoi mettre en valeur, avec une attention à ne pas surligner par des effets faciles de brillance, les courbes chantantes, les douceurs romantiques de l’écriture de Hersch. Au rappel régulier d’une inspiration qui trouve ses sources dans la musique classique européenne du XIXe siècle, celui-ci ajoute des citations, discrètes, du jazz afro-cubain (Havana), du blues fondateur (The Big Easy) et quelques envolées au swing détonant (la fin de The Rain Waltz, Forward Motion). Un recueil tout en raffinement et élégance musicale. Sylvain Siclier

1 CD Palmetto Records/Bertus Distribution.

  • Richard Hawley
    Further

Pochette de l’album « Further », de Richard Hawley. / MAGIC QUID LIMITED / BMG

C’est par la stridence d’une guitare saturée et le déploiement rock de la chanson Off my Mind que débute Further, le nouvel album de Richard Hawley, son huitième depuis 2001. Une direction que relance aussitôt Alone, avant de retrouver avec My Little Treasures et Further ce qui a si souvent enchanté les amateurs du chanteur et guitariste britannique, la ballade parée de cordes, écrin délicieux pour sa voix caressante, menant vers le dépouillement acoustique d’Emilina Says. Puis, un peu comme si l’album avait été avait été conçu pour deux faces de disque vinyle 33-tours, Further reprend son élan rock pour mieux reconduire vers les ambiances rêveuses jusqu’à Doors. Interprète au lyrisme expressif, Richard Hawley a ramassé ici son propos en courtes chansons. Toutes font mouche, en subtil équilibre entre l’emportement rageur et la douceur mélancolique. S. Si.

1 CD Magic Quid Limited/BMG.

  • Bill Callahan
    Shepherd in a Sheepskin Vest

Pochette de l’album « Shepherd in a Sheepskin Vest », de Bill Callahan. / DRAG CITY / MODULOR

« Cela faisait bien longtemps. Pourquoi ne rentrerais-tu pas à l’intérieur ? », chante dès la première minute le songwriter américain Bill Callahan à un vieil ami venu frapper à sa porte après une longue absence. C’est pourtant lui qui nous revient après six années de hiatus. Désormais cinquantenaire, marié et père de famille, le pilier du rock alternatif qui se faisait autrefois appeler Smog brise le silence avec un double album d’une vingtaine de chansons. Surprise, il a troqué son folk-rock réputé rugueux et nihiliste pour un country-folk arrangé, à la plénitude inédite. Les récents événements heureux qui ont changé sa vie ont manifestement eu une forte incidence sur sa musique. Sa voix grave et posée chante les choses ordinaires de la vie, toujours avec une remarquable économie de moyens et de mots. Qu’il évoque l’inspiration (Writing) ou son mariage (Watch me Get Married), ses douces introspections sont d’une beauté désarmante. Franck Colombani

1 CD Drag City/Modulor.

  • Joanne McIver & Christophe Saunière
    Canty

Pochette de l’album « Canty », de Joanne McIver et Christophe Saunière. / BUDA MUSIQUE / SOCADISC

Originaire de l’île d’Arran, au sud-ouest de l’Ecosse, la chanteuse et musicienne (flûte, cornemuse) Joanne McIver sait ce qu’elle doit à son grand-père qui lui a mis les chansons du temps jadis à l’oreille. Elle ouvre son enchanteur nouvel album en lui rendant hommage (Malcolm). Viennent ensuite la pathétique histoire d’une femme guettant son amoureux à la fenêtre, qui finalement ne viendra pas (Caite Bheil) ou le poète paysan Robert Burns (1759-1796) qu’elle imagine enfant insomniaque, l’esprit agité de mystères et de fantômes (Wee Rabbie). Accompagnée à la harpe par Christophe Saunière, parfois rejointe par des cordes, un accordéon, une basse (Alain Genty) et des cuivres qui apportent une touche insolite à cet univers celtique, elle égrène d’une voix claire et limpide, en anglais et gaélique, des petites histoires, écrites et composées en s’inspirant de ce que lui racontent ses souvenirs d’enfance. Ou ravive des personnages légendaires, tel Rob Roy MacGregor (1671-1734), le « Robin des bois » écossais qui volait du bétail aux riches pour le donner aux pauvres. Patrick Labesse

1 CD Buda Musique/Socadisc.

  • The Divine Comedy
    Office Politics

Pochette de l’album « Office Politics », de The Divine Comedy. / DIVINE COMEDY RECORDS LIMITED / PIAS

Depuis près de trente ans, la verve satirique de Neil Hannon, le démiurge de The Divine Comedy, accompagne souvent les élans romantiques de sa pop orchestrale. Délaissant cette fois les arrangements baroques au profit de vieux synthétiseurs, le dandy nord-irlandais a choisi d’exercer ses talents de chroniqueur des travers du monde contemporain en consacrant son douzième album à la vie de bureau et un quotidien aliéné par les machines. A la façon d’un Tati « british » s’amusant de l’absurdité tragi-comique des mutations technologiques, le crooner à la voix de lord illustre son propos en jouant de la robotique musicale (Office Politics, The Synthesiser Service Centre Super Summer Sale) et de la répétition de boucles (electro-glam dans Infernal Machines, funky dans Absolutely Obsolete et The Life and Soul of the Party). Si Queuejumper sautille avec entrain, si la profondeur nostalgique de Norman and Norma s’inscrit dans le meilleur du répertoire « divin », on regrettera que ce disque minutieusement arrangé, mais trop long (seize titres !), cultive sa thématique et ses clins d’œil humoristiques au détriment de la richesse mélodique habituellement chère à Neil Hannon. Stéphane Davet

1 CD Divine Comedy Records Limited/PIAS.