Devant le Parlement géorgien, à Tbilissi, dans la nuit de jeudi à vendredi. Les affrontements entre manifestants et forces de l’ordre ont fait 240 blessés selon un bilan du ministère de la santé géorgien. / ZURAB TSERTSVADZE / AP

Le président du Parlement géorgien a démissionné vendredi 21 juin après une nuit de violentes manifestations dans la capitale, Tbilissi. La veille, le député du Parti communiste russe Sergueï Gavrilov était intervenu depuis la tribune du président. Sa présence à l’hémicycle, dans le cadre d’une réunion internationale sur l’orthodoxie, a choqué dans un pays où beaucoup considèrent la Russie comme la puissance occupante d’une partie de son territoire.

Jusqu’à 10 000 manifestants se sont réunis jeudi soir devant le Parlement pour protester contre cette prise de parole et la proximité du parti au pouvoir avec Moscou. Des affrontements se sont poursuivis toute la nuit dans une ambiance de gaz lacrymogènes et de tirs de balles de caoutchouc. Un bilan faisait état, vendredi matin, de 160 manifestants et 80 policiers blessés.

Membre du parti au pouvoir, Rêve géorgien, Irakli Kobakhidze a démissionné en signe d’un « grand niveau de responsabilité » et non « d’une concession aux demandes irresponsables des partis de l’opposition », a affirmé le secrétaire général du parti, Khakha Kaladze.

« Manifestations permanentes »

Mais vendredi, l’opposition a demandé à ses partisans de sortir de nouveau dans la rue à Tbilissi à partir de 19 heures (heure locale), pour exiger l’organisation d’élections législatives anticipées et la démission du ministre de l’intérieur.

« Des manifestations pacifiques permanentes se poursuivront jusqu’à ce que ces demandes soient remplies », a affirmé Grigol Vachadzé, leader du Mouvement national uni, crée par l’ancien président en exil Mikheil Saakachvili.

Des policiers bloquent l’entrée du Parlement géorgien à Tbilissi, dans la nuit du jeudi 20 au vendredi 21 juin. / Zurab Tsertsvadze / AP

Pour faire face à cette crise, la présidente du pays, Salomé Zourabichvili, est rentrée précipitamment d’un voyage en Biélorussie. Tout en disant comprendre l’indignation des manifestants, elle a dénoncé des « actions contre l’Etat et des appels au coup d’Etat venant de l’intérieur et de l’extérieur du pays », dans une référence à l’opposant en exil, l’ancien président Mikheïl Saakachvili.

Dans une vidéo sur Facebook, Mikheil Saakachvili a appelé ses partisans à « descendre dans la rue » et demandé la fin du « régime » du milliardaire Bidzina Ivanichvili, considéré comme tenant les rênes du parti Rêve géorgien. Bidzina Ivanichvili a quant à lui tenu un discours d’apaisement, assurant dans un communiqué « partager pleinement l’indignation sincère des citoyens géorgiens ». « Il est inacceptable que le représentant du pays occupant préside une rencontre au Parlement géorgien », a-t-il ajouté, précisant avoir demandé au président de l’Assemblée de suspendre cette conférence religieuse.

Tensions

L’intervention du député russe rappelle les tensions entre les deux pays, qui se sont affrontés lors d’une brève guerre en 2008. L’armée russe était alors intervenue sur le territoire géorgien pour soutenir l’Ossétie du Sud, territoire séparatiste prorusse où Tbilissi avait lancé une opération militaire.

Tenant d’une ligne euro-atlantique qui fait du rapprochement avec l’UE et l’OTAN une priorité, le pouvoir en place en Géorgie est souvent ­accusé par l’opposition d’entretenir une certaine complaisance vis-à-vis de Moscou, ou au minimum d’éviter la confrontation.