« Le livre de l’intranquillité », de Fernando Pessoa, vu par Chema Madoz. Chema Madoz a commencé  la photographie dans les années 1980, à sa sortie de l’Académie  des beaux-arts de Madrid. Il réalise des natures mortes en proposant, à partir d’objets banals, une mise en abyme surréaliste, loufoque et poétique. Chaque mise en scène est un conte de la vie des choses ordinaires qui deviennent extraordinaires. Chema Madoz raconte l’absurdité, les rêves, le temps qui passe et les sentiments. Il est représenté à Paris par la galerie Esther Woerdehoff. / Chema Madoz

Editorial. Le livre, cet objet qui peut s’afficher dans une bibliothèque, se froisser dans un sac à main, s’annoter, rester des mois sur une table de chevet, se relire encore et encore, se partager, s’offrir. Le livre, ce luxe suprême, bulle de rêve, d’imagination, de voyage, instant de larmes, de rires, de questionnements, d’émotions, d’apprentissages, de découvertes.

Nous voulons saluer la littérature, la grande littérature, celle qui reste, malgré les années et les décennies, celle qui s’embellit et grandit avec les années et les décennies. Des livres passés immédiatement à la postérité, d’autres qui sont restés confidentiels, certains qui ont attendu longtemps avant d’être traduits en français, des livres que vous aurez envie de partager avec vos enfants, vos parents, vos proches, des livres que vous aurez peut-être envie de relire.

Dans une société où les algorithmes voudraient faire leur loi, nous faisons le choix de la subjectivité. Celle de nos journalistes depuis soixante-quinze ans dont le métier est de lire, lire, lire, des milliers de livres pour partager leurs découvertes, chaque semaine, dans « Le Monde des livres ». C’est à un voyage dans la littérature que nous vous convions à travers une sélection joyeuse des 100 romans qui ont le plus enthousiasmé les critiques littéraires du Monde depuis sa création, en 1944.

Le risque de l’injustice

Comme pour un tour du monde, il existe mille et un chemins possibles, autant d’étapes, de frontières. Notre liste a évidemment fait l’objet de discussions serrées, animées, douloureuses aussi, et il a fallu choisir, élaguer, couper, trancher parmi des auteurs et des livres, au risque de l’injustice parfois. Notre liste, qui comprend à chaque fois un extrait de la critique d’origine, sera débattue et critiquée, et l’honnêteté nous oblige à dire que nous nous en réjouissons. Parce que nous attendons vos retours, vos regards, vos propositions, vos propres listes. Parce que les journalistes peuvent et doivent être critiqués. Parce que, comme les éditeurs, comme les libraires, comme les lecteurs, nous défendons le bonheur du débat et du partage.

Tiphaine Samoyault, dans l’entretien qu’elle nous a accordé, le résume en une phrase : « Cette liste a aussi la beauté des listes, celle des cohabitations improbables, des bons et des mauvais voisinages, et puis surtout des manques, un manque pour chacun ou chacune qui lit la liste. C’est d’abord ce que l’on aime dans les listes, repérer ce qui manque, pour moi”. »