Prise de température dans le RER D

« Dès demain, je prends une trottinette pour éviter cette fournaise ». 11 heures, ligne 6, il fait déjà 33 degrés Celsius (°C) mardi 25 juin dans la rame. Nous sommes encore loin des heures les plus chaudes de la journée et les plus fréquentées, mais sur cette ligne en partie aérienne et non climatisée (comme 40 % du réseau de la RATP), le soleil tape fort sur la tôle des wagons et le mercure grimpe vite.

A l’intérieur, certains usagers pestent, d’autres agitent frénétiquement leurs éventails, d’autres encore, transpirant, tentent de faire abstraction. Impossible de tenir plus longtemps pour Sarah, qui décide de sortir à Glacière en jurant que pour elle, le métro, c’est fini pour la semaine. Elle fera ses trajets en trottinette, à l’air libre.

Serviette mouillée ou horaires aménagés

Pourtant, en surface la situation n’est guère plus enviable. « Vu les températures, j’ai opté pour le bus, mais je me demande si c’était le bon choix », explique Diego rencontré à l’intérieur du 325, qui relie la bibliothèque François-Mitterand au château de Vincennes. Non seulement la circulation est difficile, mais la température atteint 32 °C. Seulement 20 % des bus circulant en Ile-de-France sont, en effet, à ce jour climatisés. Et au rythme du renouvellement du parc, il faudra attendre… 2029 pour que les 11 000 bus en soient tous équipés.

Dès lors, l’annonce de la présidente de l’Ile-de-France, Valérie Pécresse (ex-Les Républicains), lundi, déclarant que les transports en commun de la région allaient être climatisés et que « d’ici cinq ans » tout le réseau serait « amélioré » a de quoi faire pester les usagers qui s’engouffrent à Châtelet dans le RER D. Sur cette ligne, qui transporte chaque jour 615 000 voyageurs, aucun wagon ne bénéficie de système de refroidissement.

Retour dans la ligne 6. A 16 heures, notre thermomètre dépasse les 37 degrés Celsius, sans le moindre brin d’air pour venir rafraîchir ou du moins sécher les usagers dégoulinants. Alors chacun à son astuce pour tenter de survivre à cette ambiance étouffante. « Il n’y a pas de secrets, il faut garder de l’eau fraîche sur soi. Moi j’ai un sac isotherme avec des blocs de glace pour qu’on puisse se désaltérer régulièrement », raconte Virginie, accompagnée de sa fille en poussette et habituée de la ligne. Francis, retraité, ne « sort plus sans sa serviette mouillée sur la nuque depuis 2003 ». D’autres aménagent leurs horaires, comme Eric, analyste qui s’est « arrangé avec son patron pour arriver une heure plus tôt et partir une heure avant et ainsi pour éviter les heures de pointe ».

Les esprits s’échauffent aussi

Malgré ces astuces, à ce niveau de température, les esprits s’échauffent d’autant plus vite que les transports parisiens restent, canicule ou pas, bondés. Dans la ligne B, qui relie l’aéroport de Roissy - Charles-de-Gaulle à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines), il fait 35 °C à 17 heures à la station Luxembourg, lorsque la rame ne redémarre pas en raison d’un malaise voyageur. Le stress monte, les passagers craignant de rester coincés sans le moindre souffle d’air. A la chaleur suffocante, se mêlent les odeurs de transpiration… soupirs agacés, des « poussez-vous ! » agressifs fusent de personnes cherchant à s’extirper de cette étuve. « Il suffit d’un coup de chaud et les gens ne respectent plus personne », témoigne Vanessa, visiblement agacée.

Pas de chance pour eux, ils sont montés dans une des rames de la ligne B non pourvue de ventilation réfrigérée (90 % le sont). Or, lorsque celle-ci fonctionne, la température est de 5 °C inférieure.

Tous les voyageurs rencontrés regrettent l’absence de système permettant d’abaisser les températures. Pour le moment, seules les lignes 1, 2, 5 et 9 en bénéficient (la 14 est encore en cours de rénovation). « Elles représentent environ 60 % du parc, explique Sébastien Mabille, responsable presse d’Ile-de-France Mobilités. Nous estimons que 70 % du réseau ferré francilien devant être équipé d’ici fin 2021. » Mais attention, il ne s’agira pas de « vraie » climatisation, qui provoquerait une augmentation drastique de la température dans les gares, en raison de l’air chaud qu’elles dégagent.

8 heures, ligne 6 : il fait déjà 29 degrés ce mercredi 26 juin dans la rame, contre 22 °C dans la rue… Et le pic de la canicule est attendu jeudi.