Les deux buts de Megan Rapinoe ont montré aux Françaises d’Amandine Henry l’écart existant encore entre les Bleues et les Américaines. / FRANCK FIFE / AFP

CHRONIQUE. L’équipe la plus compétitive, la plus expérimentée et la plus équilibrée collectivement l’a emporté. Même si l’enthousiasme et le dynamisme des Françaises ont pu parfois mettre en difficulté les Américaines, ces dernières ont délivré une leçon de pragmatisme.

Etre menées d’entrée a posé d’énormes soucis aux Bleues, et a tout faussé, car elles n’ont pas l’habitude de devoir faire le jeu. Ayant rapidement ouvert la marque, les Américaines leur ont volontairement cédé le milieu de terrain, en positionnant la milieue Ertz entre les deux défenseures centrales (en 5-3-2).

Leur objectif était clair : renforcer la défense pour contrer les très nombreux centres français, ce qu’elles ont fait. En cédant le cœur du jeu aux Bleues, elles leur ont volontairement laissé le jeu. Et même si ça leur a posé des problèmes de gestion en fin de rencontre, elles repartent avec ce qu’elles étaient venues chercher : la qualification.

Évoluant à l’extérieur, face à l’enthousiasme d’une équipe portée par son public, les Américaines n’ont pas cherché à briller. On a assisté à une leçon de réalisme d’une équipe ayant bien compris les enjeux d’un match à élimination directe.

Elles ont attaqué les deux mi-temps très fort, comme si elles prenaient le pari de mettre rapidement les Bleues en difficulté, et ont eu de la réussite. Ensuite, elles sont allées chercher la qualification, sans tenter de se montrer sous leur meilleur jour en matière de jeu.

Dès leur ouverture de la marque, elles ont laissé venir les Françaises en semblant dire “Venez maintenant, on va voir ce que vous êtes capables de faire”. Elles ont pris un risque majeur, mais il s’est avéré payant. Pour se qualifier, elles ont accepté de subir le jeu pour prendre les Françaises en contre. C’est le signe d’une équipe évoluant à un niveau supérieur dans de nombreux domaines.

Si physiquement et techniquement, les Américaines sont loin d’avoir écrasé les Bleues, collectivement, elles ont fait preuve d’une expérience supérieure. Notamment par leur capacité à systématiquement venir au soutien d’une coéquipière en difficulté pour proposer une solution.

Côté français, le pire scénario s’est produit : encaisser le premier but, ce qui oblige à prendre des risques en permanence. Et si elles ont pu revenir sur coup de pied arrêté, elles ont rarement été en capacité de combiner dans le jeu.

Or, pour inquiéter pareil adversaire, il faut un jeu collectif bien plus dense, plus léché et complémentaire, notamment dans la finition. C’est ce qui est le plus difficile à construire, notamment en sélection où l’on a des additions d’individualités venant de partout.

Cette équipe américaine, qui s’adapte à toutes les circonstances de jeu, m’évoque les Bleus l’an passé, qui s’appuyaient beaucoup sur les erreurs de l’adversaire. Au final, elles ont montré peu de choses lors de ce match, mais dès qu’elles ont eu la volonté et le courage de le faire, elles ont fait mouche. Aux Françaises d’apprendre de cette leçon.

Jean-Marc Furlan

Jean-Marc Furlan est devenu entraîneur de l’AJ Auxerre (Ligue 2) à l’intersaison, après avoir mené le Stade brestois vers la Ligue 1. Il analyse pour « Le Monde » les matchs de l’équipe de France féminine pendant la Coupe du monde.