Emmanuel Macron rencontre Angela Merkel à la Délégation française. Avec la délégation française dans les coulisses des négociations lors du sommet européen pour la désignation des "top jobs", nominations d'une série de personnalités qui prendront les rênes de l’Union européenne. À Bruxelles, dimanche 30 juin 2019 - 2019©Jean-Claude Coutausse pour Le Monde / JEAN-CLAUDE COUTAUSSE POUR LE MONDE

Les dirigeants européens tentaient dans la nuit de dimanche 30 juin à lundi 1er juillet de sortir leurs négociations de l’impasse, provoquée par leurs dissensions pour désigner le nouveau chef de la Commission, clef pour les nominations aux autres postes de pouvoir de l’Union européenne (UE). Si bien que lundi au petit matin, l’hypothèse d’un nouveau sommet était évoquée par de nombreuses délégations, après un premier échec il y a une dizaine de jours.

Le sommet qui avait commencé avec trois heures de retard a été suspendu vers 23 h 30 pour permettre au président du Conseil, le Polonais Donald Tusk, de mener des consultations bilatérales avec chacun des dirigeants des Vingt-Huit, a annoncé son porte-parole. Elles étaient toujours en cours à 3 h 30 lundi.

Le sommet a déraillé avant même d’avoir commencé, lorsque les dirigeants membres du Parti Populaire Européen (PPE-droite) ont rejeté l’accord accepté par Angela Markel pendant le G20 d’Osaka, au Japon.

Merkel contestée

Pour la première fois, la chancelière allemande a été ouvertement contestée pendant un sommet du PPE et accusée d’avoir accepté un accord contraire à celui initialement étudié par sa famille politique. Premier parti politique au Conseil et au Parlement européen, le PPE a vu son candidat, l’Allemand Manfred Weber, recalé lors du précédent sommet le 20 juin.

Il aurait accepté de soutenir la nomination du candidat de la famille sociale-démocrate, le Néerlandais Frans Timmermans, à condition d’obtenir les présidences du Parlement européen et du Conseil, selon deux sources qui ont participé aux négociations, citées par l’Agence France-Presse (AFP).

Les sociaux-démocrates, deuxième force politique au Conseil et au Parlement, soutiennent la revendication du PPE, ont précisé ces deux sources. Mais les Libéraux ont refusé les termes de cet accord et ont obtenu d’Angela Merkel la présidence du Conseil lors des discussions en marge du sommet du G20 vendredi et samedi à Osaka, ce qui a déclenché la colère du PPE. « L’accord a été détruit » à Osaka, a déploré un responsable du PPE, sous couvert de l’anonymat. « Il est mort. Il n’y aura pas d’accord ce soir », a-t-il affirmé à l’AFP. « Aucun des dirigeants du PPE n’a accepté » ce qui a été négocié à Osaka, a confirmé le premier ministre irlandais Leo Varadkar, membre du PPE.

La droite tient la clef de ces nominations. Aucune solution ne peut être avalisée sans le soutien de cette famille politique, car aucune majorité n’est possible sans les votes de son groupe au Parlement européen.

La crise entre Merkel et le PPE n’avait pas été anticipée, il y a eu un manque de communication, a indiqué à l’AFP une source française qui a prédit une nuit blanche. Les dirigeants du PPE ont toutefois laissé Donald Tusk tenter de sauver le sommet avec la recherche d’un consensus sur la base du premier accord entre le PPE et les sociaux-démocrates. La plupart des dirigeants « peuvent vivre » avec l’accord Timmermans-Weber et les discussions portent sur les autres postes, a indiqué à l’AFP un négociateur aux premières heures de la journée de lundi. 

« C’est compliqué pour la présidence du Conseil », a-t-il ajouté. Selon une source européenne, les noms évoqués pour ce poste sont ceux de deux Libéraux, la Danoise Margrethe Vestager et le Belge Charles Michel. Dans ce cas, la France pourrait demander la présidence de la BCE, selon cette même source.

Une nouvelle réunion envisagée

Un nouveau sommet sera peut être nécessaire pour boucler un accord et la date du 15 juillet, pendant la deuxième session du Parlement européen. Le président français Emmanuel Macron et Mme Merkel veulent trouver un accord cette nuit « quitte à prendre du temps, il est même envisagé de déborder jusqu’à lundi matin s’il le faut », a toutefois nuancé la source européenne.

L’Assemblée doit impérativement élire son nouveau président lors de sa session inaugurale mercredi 3 juillet. « Le choix du président du Parlement est totalement indépendant (...) Nous élirons notre président le 3 juillet quel que soit le résultat » du sommet, a affirmé dimanche le président sortant, l’Italien Antonio Tajani, membre du PPE.

La désignation du président de la Commission européenne peut en revanche être retardée. L’actuel chef de l’exécutif bruxellois, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, est en fonction jusqu’au 31 octobre. La personnalité désignée devra obtenir l’aval de 21 des 28 membres du Conseil et une majorité d’au moins 376 voix au Parlement. Quatre pays d’Europe de l’Est membres du groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie), sont ouvertement hostiles à M. Timmermans, qui a lancé des procédures pour violation de l’Etat de droit contre Budapest et Varsovie.