Paris n’est « pour l’instant pas prêt à ratifier » l’accord de libre-échange trouvé entre l’Union européenne et les pays du Mercosur, a déclaré mardi 2 juillet la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye, alors que le compromis conclu vendredi soir continue à susciter de nombreuses critiques en France et en Europe.

Intervenant en début d’après-midi devant l’Assemblée nationale, le ministre des affaires étrangères Jean-Yves le Drian a ajouté que la France « a défini des lignes rouges fermes » sur des dispositions que cet accord devra contenir, faute de quoi elle ne l’acceptera pas. « On nous dit qu’elles sont prises en compte, il ne suffit pas de déclaratif, il nous faut des actes, a ajouté le chef de la diplomatie française. Et quand je vois que sur l’accord de Paris [sur le climat], il y a un revirement considérable du président brésilien, on demande à ce que ce soit concrétisé dans des orientations précises. Nous demandons à voir ».

Comme lors des négociations dans le cadre de l’accord de libre-échange Ceta entre l’Union européenne et le Canada, la France demandera « des garanties » aux pays sud-américains du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay), a assuré Mme Ndiaye sur BFMTV et RMC. « Moi je ne peux pas vous dire que nous allons aujourd’hui ratifier le Mercosur. On va le regarder dans le détail et en fonction de ce détail, nous allons décider. La France pour l’instant n’est pas prête à ratifier », a-t-elle ajouté.

Un long parcours jusqu’à l’application

Sur Europe 1, le ministre de la transition écologique, François de Rugy, a assuré que l’accord ne serait ratifié que si le Brésil respecte ses engagements, notamment en matière de lutte contre la déforestation en Amazonie. « La nouvelle Commission européenne et surtout la nouvelle majorité au Parlement européen aura à décortiquer cet accord avant de le ratifier », a-t-il insisté. Le président français Emmanuel Macron avait salué samedi la conclusion de ce vaste traité de libre-échange, tout en se disant « vigilant » sur sa mise en œuvre.

Avant que cet accord n’entre en application, « il faudra plusieurs étapes, dont une validation du Conseil des chefs d’Etat et de gouvernements (européens), puis une validation du Parlement (européen) puis des Parlements (nationaux) », a précisé M. Le Drian. En France, « le Parlement ne se prononcera qu’après qu’une étude indépendante d’impact soit menée de manière complète et transparente », a-t-il dit. « La France jugera sur pièces ».

Un long parcours attend désormais le compromis de vendredi, qui va d’abord être traduit en véritable texte juridique, ce qui prendra plusieurs mois, avant d’être soumis à l’approbation des Etats membres dans le cadre du Conseil de l’UE, l’institution qui les représente. L’usage veut que l’unanimité soit nécessaire. L’UE pourra alors le signer officiellement, avant un vote du Parlement européen qui entraînera son entrée en vigueur provisoire. Le texte devra alors être approuvé dans chaque Etat membre, ce qui signifie qu’il passera dans la plupart des cas devant les Parlements nationaux, avec débats politiques à la clé.