Scène de liesse à Antananarivo, après la victoire des Zébus malgaches face aux Léopards congolais, dimanche 7 juillet 2019 à Alexandrie. / RIJASOLO / AFP

Une bouffée de bonheur au cœur de l’hiver… A la « une » des journaux malgaches, c’est la joie ce lundi matin. Le premier quotidien de l’île en nombre d’exemplaires vendus, Midi Madagasikara, salue la performance « héroïque » de la sélection de Nicolas Dupuis. Cet homme est quasiment devenu une vedette nationale depuis que l’équipe malgache franchit une à une les différentes étapes de la Coupe d’Afrique des nations (CAN).

La compétition, qui se déroule jusqu’au 19 juillet en Egypte, voit en effet les « petits poucets », comme est surnommée cette équipe qui n’avait jamais brillé à l’international auparavant, gagner tous ses matchs et éliminer des équipes plus chevronnées. Dimanche, elle a battu en huitièmes de finale l’équipe de la République démocratique du Congo (RDC) aux tirs au but (4-2), après un match (2-2). La voilà donc en route pour les quarts de finale.

POV

Dans L’Express de Madagascar, le célèbre journaliste dessinateur Pov légende son dessin ainsi : « Meurtrie continuellement par les tristes nouvelles de kidnappings, banditismes, meurtres, pauvreté extrême, insalubrité, épidémies, corruption, clivages ethniques, économique, politique, etc., c’est incroyable de constater que la nation est capable d’une telle communion, fédérée par cette merveilleuse équipe de foot. »

L’ensemble de la presse locale partage son approche. L’arrivée des Zébus en quarts de finale fait écrire à L’express de Madagascar que « les Barea s’imposent au bout du suspense ». Et l’article revient ensuite avec force détails sur l’ascenseur émotionnel qu’ont été ces huitièmes de finale pour les Malgaches. Les joueurs n’ont pas manqué d’énergie précise le quotidien, récompensés par un premier but d’Amada dès la 9e minute, qui se réjouit que « la superbe épopée du petit poucet malgache continue ».

Concert de klaxons et de vuvuzelas

Les Nouvelles, un autre quotidien, écrivent plus vindicatifs que « les Barea encornent les Léopards ». Une manière de rendre hommage aux Congolais eux aussi très en forme, malgré leur défaite. Mais, comme l’explique le journal, « les petits poucets » font finalement leur trou dans la CAN. Et font trembler les plus grands !

Aux abords de la place de l’Indépendance, dans la capitale malgache, plongée dans un silence de plomb après l’interminable séance de tirs au but, la nuit de dimanche à lundi a été chaude. La joie a explosé telle une grenade dégoupillée dès le coup de sifflet final. Très vite, le quartier d’Analakely, centre névralgique de la ville, s’est rempli de supporteurs de tous âges et tous milieux. Peu importe la nuit, peu importe le froid de l’hiver austral et le peu d’éclairage public, la ville a crépité au son des pétards bon marché et s’est illuminée des fumigènes.

Durant plusieurs heures, les cortèges de drapeaux blanc, rouge et vert ont dévalé les rues, dans un sens ou dans l’autre, dans une atmosphère bon enfant. Au milieu du concert de klaxons et de vuvuzelas, on a même pu reconnaître la profusion du répertoire de chansons traditionnelles malgaches.

La place du 13 mai et ses abords sont un lieu chargé d’histoire pour les Malgaches depuis la fin de la colonisation. En l’espace d’un an, ce quartier a été le témoin du pire comme du meilleur. C’est là que, le 21 avril 2018, des manifestations contre le régime Rajaonarimampianina ont fait au moins un mort et six blessés. Pendant des mois, son accès est resté restreint. Mais ce 7 juillet, le football a montré que cette place pouvait aussi être un endroit de pure communion et de pure célébration. Un lieu de bonheur.

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