Dylan Groenewegen s’était imposé lors de la plus longue étape du Tour de France 2018. / STEPHANE MAHE / REUTERS

Un suiveur du Tour de France ayant choisi de disparaître du monde durant deux ans n’y reconnaîtrait pas ses petits, mardi 9 juillet, en regardant le sprint attendu sur la rive de la Meurthe à Nancy, terme de la 4e étape du Tour de France.

Qui sont ces jeunes molosses jouant du gros braquet sur toute la largeur de la route ? Où sont ces anciens phares du sprint, ceux qui régnèrent sur les emballages après la retraite de Thor Hushovd, Robbie McEwen et Alessandro Petacchi ?

Un quatuor de souverains s’était détaché : Mark Cavendish le court britannique, Alexander Kristoff le géant norvégien, Marcel Kittel le photogénique allemand et son compatriote, Andre Greipel, des cuisses comme des enclumes.

Il y avait aussi Peter Sagan, le Slovaque, plus polyvalent, qui donnait l’impression d’avoir toujours été là et de pouvoir durer encore dix ans. A eux cinq, ils avaient remporté l’intégralité des 34 sprints massifs disputés sur le Tour entre 2012 et 2016. La moisson s’était poursuivie, pour Kittel, en 2017.

Mais, depuis, les vieux courbent l’échine, et la première moitié de saison a confirmé le changement de génération entamé en 2018. Depuis le début de l’année, seuls Sagan (trois victoires) et Kristoff (une) ont gagné au niveau World Tour.

La relève vient de partout : Allemagne (Pascal Ackermann), Irlande (Sam Bennett), Colombie (Fernando Gaviria), France (Arnaud Démare), Australie (Caleb Ewan), Pays-Bas (Dylan Groenewegen).

Seuls les deux derniers sont présents sur le Tour cette année. La hiérarchie entre ces hommes, tous entre 23 et 28 ans, est mouvante. Elia Viviani et Peter Sagan, trentenaires ou presque, repoussent encore la prise de pouvoir. Mais leurs aînés semblent définitivement dépassés. « Les jeunes sprinteurs sont moins lourds, plus aérodynamiques, et grimpent mieux », constate André Greipel.

Mononucléose pour Cavendish, burn-out pour Kittel

Alexander Kristoff, 32 ans, se voit un avenir dans les courses d’un jour, où l’endurance et la science de la course compensent sa perte d’explosivité. S’il joue sa carte personnelle sur ce Tour de France, c’est parce que Gaviria a déclaré forfait sur blessure. André Greipel, 36 ans, n’a toujours pas gagné en Europe cette année. A l’intersaison, c’est Caleb Ewan qui l’a chassé de son équipe de toujours, Lotto-Soudal.

Quant à Mark Cavendish et Marcel Kittel, ils n’ont même pas vu Bruxelles. Pour le premier, c’est une affaire qui, vu de Grande-Bretagne, relève du crime de lèse-majesté. Le patron sud-africain de l’équipe Dimension Data, Douglas Ryder, a consigné à la maison le vénérable Cavendish, lequel court toujours après le record de victoires d’étapes dans le Tour de France détenu par Eddy Merckx (30 contre 34).

Non par souci de ne pas fâcher le Belge, hôte du grand départ, mais parce que le « Cav » peine à se rebiffer cette saison, toujours à plat depuis qu’une mononucléose lui a été diagnostiquée en 2017. « J’étais prêt », a clamé le Britannique, soutenu par son mentor au sein de l’équipe, Rolf Aldag. En vain.

Marcel Kittel, de son côté, a rompu son contrat avec Katusha-Alpecin en mai, affirmant se poser des questions sur son avenir « en tant qu’homme et qu’athlète ». Son équipe, qui l’avait accueilli à grands frais un an et demi plus tôt, remettait régulièrement en cause son professionnalisme.

Dans un communiqué, l’Allemand aux 14 victoires sur le Tour a décrit tous les symptômes d’un burn-out. Il n’exclut pas, à 31 ans, de revenir dans le peloton, et des rumeurs l’envoient déjà dans plusieurs équipes.

C’est Mark Cavendish qui, sur Twitter, lui avait rendu le plus bel hommage : « Il est le premier coureur qui m’ait contraint à trouver une stratégie pour le battre. » Après avoir joué des coudes, voici l’heure de les serrer.