Le pire a-t-il été évité ? Malgré des chocs à répétition sur le chiffre d’affaires de nombreux commerçants et artisans au plus fort de la crise des « gilets jaunes », on n’a pas observé, ces derniers mois, de hausse massive des défaillances d’entreprises. D’après une étude du cabinet Altares publiée jeudi 11 juillet, 12 347 procédures ont été ouvertes au deuxième trimestre, soit 3,1 % de moins que sur la même période en 2018. Le niveau de sinistralité le plus bas depuis dix ans

« Certes, les défaillances augmentent encore fortement localement, notamment à Marseille, Rouen ou Chambéry, mais sur l’ensemble du territoire les audiences n’ont pas connu les affluences redoutées quelques mois plus tôt. (…) Mieux, plusieurs [tribunaux de commerce] constatent un recul des contentieux, voire des injonctions de paiement », souligne Thierry Millon, directeur des études chez Altares.

Microplan d’aide

Ce n’était pas gagné… Décembre 2018 a été « le mois de clôture annuel le plus sinistré depuis 2015 », rappelle M. Millon. En janvier, les défaillances affichaient une hausse de 11 %. Si les entreprises ont finalement tenu, c’est, semble-t-il, grâce au dispositif mis en place par les pouvoirs publics.

Supervisé par la cellule de continuité économique, ce microplan d’aide avait été déployé à partir de la fin novembre 2018. Il prévoyait notamment des facilités en cas de dépassements de découvert, un étalement des échéances sociales et fiscales ainsi qu’un recours simplifié au temps partiel. Des mesures censées courir jusqu’à la fin mars, mais qui avaient été prolongées jusqu’en avril puis finalement jusqu’à fin juin.

D’après les décomptes de la Direction générale des entreprises (DGE) arrêtés au 31 mai, « 2 488 entreprises ont bénéficié de mesures de soutien mises en œuvre par le réseau de la Direction générale des finances publiques ». A la même date, les délais de paiement accordés représentaient un montant de cotisations de plus de 112 millions d’euros.

Le nombre d’emplois menacés en augmentation

Quelles sont les sociétés qui ont, malgré tout, été placées en procédure de sauvegarde, redressement judiciaire ou liquidation au deuxième trimestre ? Des très petites entreprises (TPE) à 94 %, mais également des structures plus grosses, d’au moins 100 salariés, selon Altares. Résultat : le nombre d’emplois directement menacés augmente, s’établissant pour le trimestre à 41 000, soit 1 200 de plus que sur la même période en 2018.

Les secteurs les plus touchés sont le transport et la logistique, de même que les services aux entreprises. Les défaillances grimpent dans le conseil en communication et gestion (+ 10,3 %), le nettoyage de bâtiments (+ 11,5 %), la sécurité (+ 9,1 %), ainsi que dans l’imprimerie (+ 58,3 %) et le fret interurbain (+ 20,5 %).

Plusieurs sous-traitants automobiles pour les moteurs diesel inquiètent également. « A ce jour, nous avons identifié 54 sites en situation fragile ou en difficulté avérée qui emploient un peu plus de 13 400 salariés. Cela représente un quart des effectifs identifiés dans le secteur », a fait savoir, mercredi 10 juillet, la DGE.

Pour l’ensemble de l’année, l’assureur-crédit Euler-Hermes s’attend tout de même à une hausse des défaillances de 2 %, faible consommation et ralentissement de la croissance obligent. « Néanmoins, les conditions de business s’améliorent lentement, remarque Thierry Millon. Le regain de pouvoir d’achat obtenu “grâce” au mouvement des “gilets jaunes” pourrait bien permettre de tirer la consommation du second semestre et la croissance. »

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