Les deux personnages principaux de « 13 Reasons Why ». / NETFLIX

La scène avait fait scandale, son retrait aussi. Netflix a annoncé mardi 16 juillet que deux ans après la sortie de la série 13 Reasons Why, la scène montrant le suicide de Hannah, son personnage principal, serait désormais censurée. « Suivant l’avis d’experts médicaux, dont celui du docteur Christine Moutier, responsable médicale de la Fondation américaine pour la prévention du suicide, nous avons décidé, avec l’accord du créateur de la série Brian Yorkey et de ses producteurs, de supprimer la scène de la saison 1 durant laquelle Hannah se tue », écrit Netflix dans un bref communiqué.

Cette scène de suicide, très violente, avait concentré de nombreuses critiques lors de la sortie de 13 Reasons Why. Les spécialistes de la prévention du suicide recommandent de ne pas montrer à l’écran des scènes détaillées de suicide, ou détaillant ses modalités exactes ; et certaines recherches montrent que ce type de séquences peuvent avoir un effet d’entraînement auprès de personnes fragilisées, qu’il s’agisse de personnages de fiction ou d’images d’actualité.

La série avait connu il y a deux ans un gigantesque succès d’audience, et lancé aux Etats-Unis une vaste discussion sur le suicide. Ses détracteurs l’accusaient de « glorifier » ou de « rendre glamour » ce passage à l’acte. Ses soutiens soulignaient à l’inverse qu’elle incitait à une réflexion sur la souffrance d’autrui et la violence du passage à l’acte.

Entre-temps, des chercheurs se sont penchés sur les éventuels effets de la série sur les jeunes : une première étude a montré que le mois suivant la diffusion de la première saison, les suicides d’adolescents de 10 à 17 ans avaient augmenté de 29 % aux Etats-Unis – une augmentation significative, mais qui ne concernait que les garçons, et pour laquelle « plusieurs limites importantes » n’ont pas permis aux auteurs de « tirer des conclusions entre la diffusion de 13 Reasons Why et l’accroissement des suicides chez des jeunes aux Etats-Unis ».

Une autre étude internationale portant sur la saison 2, dans laquelle le suicide occupe une place un peu moins centrale, a montré que les spectateurs qui avaient abandonné la série en cours de route avaient un risque de suicide plus élevé et un moindre optimisme dans l’avenir. Mais chez les spectateurs étant allés jusqu’au bout, les chercheurs ont noté des effets très différents, avec une baisse des pensées suicidaires, mais aussi une plus grande propension à se dire prêt à apporter leur aide pour éviter le passage à l’acte d’une personne qui veut se suicider.

Mécontentement général

L’annonce de Netflix ce 16 juillet a, elle, presque réussi à faire l’unanimité contre elle. Sur les réseaux sociaux, l’annonce de la censure de la scène du suicide agace les fans de la série – qui déplorent la suppression d’une séquence clé autour de laquelle presque toute l’intrigue de la première saison est bâtie, et qui avait selon eux le mérite de montrer de manière réaliste l’horreur du passage à l’acte.

Mais les spectateurs qui estimaient que cette scène n’aurait pas dû être diffusée n’apprécient pas non plus le fait que Netflix ait mis deux ans pour arrêter sa diffusion, alors que les recommandations des associations et des spécialistes de la prévention du suicide n’ont pas changé entre-temps. Certains internautes voient dans cette annonce une simple tentative de faire à nouveau parler de la série, alors qu’une troisième saison doit être diffusée cet automne et qu’une quatrième saison vient d’être commandée, selon la presse spécialisée américaine.