LCP - JEUDI 18 JUILLET - 20 H 30. DOCUMENTAIRE

Avions, blindés, missiles… La France vend des armes, beaucoup et depuis longtemps. Dans ce pays qui fait aussi la guerre sans discontinuer ou presque depuis plusieurs décennies, le fait ne semble pas émouvoir autant que dans d’autres démocraties. Est-ce le rôle de la France d’exporter des armes dans le monde entier, particulièrement au Moyen-Orient aujourd’hui à feu et à sang ? « Oui, c’est notre rôle », tranchait François Hollande en avril 2017 dans l’usine du missilier MBDA, car sans cela « le risque c’est que d’autres le fassent à notre place ». Un « Circulez, rien à voir ! » que le documentaire de la journaliste Anne Poiret tente de bousculer.

Avec 17 milliards d’euros de ­prises de commandes en 2016, montant record, la présidence de François Hollande a plus que toutes les autres vendu canons et munitions, ­rappelle le film. L’exécutif a agi au nom de la défense de la sou­veraineté nationale, en déclarant vouloir préserver des industries de haute technologie et leurs précieux emplois – quelque 170 000 dans la filière.

Interpellation morale

Et pourtant aucun des responsables de l’époque n’a assumé cette politique devant la caméra d’Anne Poiret : ni le chef de l’Etat qui a scellé le contrat historique du Rafale et des frégates avec le dictateur égyptien Abdel Fattah Al-Sissi en lui accordant d’importantes garanties ; ni son ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, présenté par l’exécutif comme le chef performant de « l’équipe France », qui a engrangé des ventes depuis l’Inde jusqu’au Qatar ; ni le secrétaire général pour la défense et la sécurité nationale Louis Gautier (membre du conseil de surveillance du Monde), qui chapeaute sous l’autorité de Matignon les autorisations d’exportation. Les parlementaires ne sont pas plus prolixes. Ni les industriels. Se heurtant partout au secret-défense, le documentaire effectue un périple à la porte des usines et des salons de l’armement, où nul ne souhaite vanter la qualité de ses produits.

Dans les démocraties occidentales, la guerre au Yémen a, depuis 2015, relancé une forte interpellation morale. Le débat qui a opposé en 2016 le ministère des affaires étrangères français à celui de la défense n’a pas dépassé les premiers cercles de l’Etat. Faut-il attendre un scandale pour qu’évolue la position française ?, s’interroge le film. Un détour par l’attentat de Karachi – onze salariés français de DCN tués en 2002, une affaire en lien avec des commissions versées lors de la vente de sous-marins au Pakistan – permet de rappeler que vendre des armes ne va jamais sans risque.

Mon pays fabrique des armes, d’Anne Poiret (France, 2018, 52 min).

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