Le gouverneur de Porto Rico, Ricardo Rossello, annonce dans une video sa démission, le 25 juillet. / HANDOUT / REUTERS

Le gouverneur de Porto Rico, Ricardo Rossello, a annoncé mercredi 24 juillet sa prochaine démission, après deux semaines de manifestations massives à la suite de propos offensants sur les femmes, les homosexuels et les victimes de l’ouragan Maria. « Après avoir entendu les accusations et discuté avec ma famille (…) j’ai pris la décision suivante de manière désintéressée : aujourd’hui je vous annonce que je démissionnerai du poste de gouverneur avec effet au vendredi 2 août à 17 heures », a déclaré M. Rossello dans une vidéo diffusée par le gouvernement. 

« J’espère que Porto Rico continuera à être uni et à avancer comme il l’a toujours fait », a ajouté le gouverneur. « Et j’espère que cette décision sera un appel à la réconciliation citoyenne ». M. Rossello a déclaré que la secrétaire à la justice, Wanda Vazquez, lui succéderait temporairement.

Dès la fin de la diffusion de la vidéo, des manifestants présents dans les rues de San Juan ont commencé à scander « Olé, olé, olé », exultant de joie. De nombreux Portoricains avaient attendu cette nouvelle avec impatience tout au long de la journée, tandis que circulaient avec insistance des rumeurs sur une démission imminente du gouverneur. Pourtant, mardi, M. Rossello, 40 ans, avait affirmé qu’il ne comptait pas démissionner, malgré les milliers de manifestants appelant à son départ depuis une dizaine de jours.

Commentaires homophobes sur Ricky Martin

Manifestations de joie à San Jose après l’annonce de la démission du gouverneur de Porto Rico, le 24 juillet. / JOE RAEDLE / AFP

Le Centre de journalisme d’investigation de Porto Rico a révélé mi-juillet le contenu de conversations entre le gouverneur et onze hauts responsables locaux, anciens ou actuels, sur la messagerie Telegram. Ces hommes y échangent blagues misogynes et commentaires homophobes, visant notamment le chanteur vedette Ricky Martin. Les manifestations se succédaient depuis sur l’île caribéenne pour demander le départ de M. Rossello, dont l’administration est également accusée de corruption et de détournement de fonds.

Plusieurs célébrités, dont Ricky Martin, le rappeur Bad Bunny ou le duo de Despacito, Daddy Yankee et Luis Fonsi, participent au mouvement de contestation ou le soutiennent.

Porto Rico, un territoire américain, peine à se relever du passage de l’ouragan Maria en 2017 qui a fait 3 000 morts et détruit ses infrastructures. L’île est également secouée par un scandale de corruption. Six responsables locaux sont accusés d’avoir détourné quinze millions de dollars de fonds fédéraux destinés à la reconstruction après l’ouragan.

Porto Rico : quel statut par rapport aux Etats-Unis ?

  • Un statut flou d’« Etat libre associé »

Malgré plusieurs référendums organisés à Porto Rico plébiscitant le statut d’Etat américain pour ce territoire – le dernier ayant eu lieu en juin –, l’île n’est qu’un « Etat libre associé » depuis les années 1950.

Concrètement, ses relations avec les Etats-Unis sont complexes. Les Portoricains ne paient pas d’impôts fédéraux, mais ils contribuent à la Sécurité sociale, au système Medicare (assurance santé pour les plus de 65 ans, notamment) et paient les taxes à l’import et à l’export. En outre, l’intégralité des amendements de la Constitution ne s’applique pas à Porto Rico.

  • Les Portoricains, des citoyens américains

Les 3,4 millions d’habitants nés à Porto Rico sont des citoyens américains, et ce depuis le Jones-Shafroth Act de 1917. Ils peuvent circuler librement dans les 50 autres Etats américains sans passeport et sont protégés par le Bill of Rights (les 10 premiers amendements de la Constitution) des Etats-Unis.

Mais, selon un sondage publié dans le New York Times, seuls 54 % des Américains savent que les habitants de Porto Rico sont des citoyens américains.

  • Le droit de vote seulement pour les primaires

La citoyenneté ne leur accorde pas pour autant le droit de vote aux élections nationales. Les Portoricains votent pour les primaires présidentielles destinées à désigner le candidat de chaque parti, mais ils n’ont pas de représentants dans le collège électoral. Leurs voix ne sont donc pas représentées lors de l’élection présidentielle.

Porto Rico a également un délégué à la Chambre des représentants – Jenniffer González-Colón –, mais il ne peut voter qu’en commission. Si Porto Rico était un Etat, étant donné sa population, deux sénateurs et cinq représentants portoricains devraient siéger au Congrès. Après le référendum de juin, le gouverneur de l’île, Ricardo Rosello, a désigné ces sept élus fictifs pour qu’ils aillent réclamer leur siège à Washington. Jusque-là, le Congrès n’a pas accepté.