Une femme allume une bougie en hommage à Steve Maia Caniço, le 30 juillet sur la place Royale à Nantes. / LOIC VENANCE / AFP

Nantes s’apprête à vivre une journée sous tension. Samedi 3 août, des appels à manifester en hommage à Steve Maia Caniço et contre les violences policières ont été lancés, dont certains sans le soutien de la famille, et le centre-ville a été en partie interdit aux rassemblements. Une marche blanche en hommage au jeune homme de 24 ans doit débuter vers 11 heures sur l’île de Nantes, non loin de la grue jaune où le corps de cet animateur périscolaire a été retrouvé lundi dans la Loire.

Steve Maia Caniço a disparu dans la nuit du 21 au 22 juin lors de la Fête de la musique, alors qu’il assistait à un concert en bord de Loire. Après 4 heures du matin, les forces de l’ordre ont mené une opération très critiquée pour faire cesser la musique et évacuer les quais. Plusieurs personnes sont tombées dans le fleuve, des participants ont raconté avoir été aveuglés par le gaz lacrymogène.

Après celle de la matinée, une seconde manifestation doit débuter vers 13 heures à la station de tramway Commerce, dans le centre-ville. Celle-ci appelle à se mobiliser « contre les violences policières » et aura lieu à proximité immédiate du périmètre interdit par les autorités. Dans un appel à manifester, le collectif « Nantes révoltée » demande de manifester parce que les policiers « tirent des grenades pour arrêter des chansons » et « parce que l’attaque policière de la Fête de la musique n’est que l’aboutissement d’années de violences et d’impunité pour les forces de l’ordre ».

Crainte de « débordements et des violences »

Le préfet de Loire-Atlantique Claude d’Harcourt a décidé jeudi d’interdire tout rassemblement dans une grande partie de Nantes samedi de 10 heures à 20 heures, estimant avoir des « informations concordantes sur la volonté d’un certain nombre de groupes d’activistes d’en découdre avec les forces de police ».

Des arrêtés préfectoraux ont également été pris pour interdire des « artifices », « le port et le transport, sans motif légitime, d’objets pouvant constituer une arme », ainsi que « l’achat et la vente au détail, l’enlèvement ou le transport de tout carburant dans tous les points de distribution situés dans les communes de Nantes Métropole ». La préfecture dit n’avoir reçu aucune déclaration de manifester.

« Un dispositif de sécurité adapté, réactif et mobile, sera déployé pour prévenir les violences, protéger le centre-ville et procéder, le cas échéant, aux interpellations des fauteurs de troubles », prévient le communiqué de la préfecture. Cette restriction ne devrait, cependant, pas concerner la marche blanche, et laisse aussi libre d’accès la plupart des grands boulevards où peut évoluer une manifestation, notamment les cours des 50-Otages ou de Saint-Pierre.

Pourtant, selon le ministre de l’intérieur Christophe Castaner, « évidemment (…) il y a la possibilité d’organiser un rassemblement (…) mais cela est encadré pour éviter des débordements et des violences ».

Appel au calme de la famille de Steve Maia Caniço

De nombreux personnes sont venues rendre hommage à Steve Maia Caniço en se rendant sur l’île de Nantes, sur le lieu de découverte du corps du jeune homme de 24 ans, lundi 29 juillet. / LOIC VENANCE / AFP

Cet appel aux rassemblements n’a pas eu l’assentiment de la famille de la victime. Les proches de Steve « n’acceptent qu’un soutien amical, artistique et pacifique », a déclaré leur avocate Me Cécile de Oliveira. Freeform, structure nationale qui accompagne l’organisation de rassemblements festifs, a lancé un appel au calme.

« Nous tenons à rappeler que la famille et les amis de Steve ne s’y associent pas mais surtout que, de notre point de vue, tout débordement desservira la cause de la justice. »

Outre Nantes, des appels à manifester ont été lancés dans tout le pays pour ce week-end, émanant notamment de groupes de « gilets jaunes » : Toulouse, Caen, Le Havre, Montpellier, Paris samedi ou encore Tours et Rouen dimanche. Des « gilets jaunes », qui ont appelé comme chaque semaine à une manifestation samedi à Paris, invitent à un hommage à Steve en jaune avec un brassard noir.

La polémique sur l’attitude de la police le soir de la Fête de la musique reste vive. Le rapport de l’IGPN, dévoilé mardi, a été jugé par certains trop favorable aux policiers. Selon la « police des polices », « il ne peut être établi de lien entre l’intervention des forces de police (…) entre 4 h 20 et 4 h 52 quai Wilson à Nantes et la disparition de M. Steve Maia Caniço après 4 heures dans le même secteur ».

Mais des zones d’ombre demeurent. Pour « aller plus loin », le premier ministre Edouard Philippe a demandé une enquête de l’inspection générale de l’administration (IGA). Vendredi, Christophe Castaner est revenu sur l’utilisation de gaz lacrymogènes par les forces de l’ordre, admettant qu’il y avait un « questionnement » sur leur usage.

Les deux juges d’instruction de Nantes chargés de l’enquête sur la mort de Steve Maia Caniço ont envoyé une requête à la Cour de cassation afin d’être dessaisis du dossier, dans un souci d’impartialité. La demande, transmise jeudi 1er août à la Cour de cassation, est assez rare et souligne l’aspect explosif du dossier que les magistrats aimeraient dépayser.

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