Des manifestants antigouvernementaux sont assis par terre devant les barrières de sécurité lors d’une manifestation à l’aéroport de Hongkong, en Chine, le 13 août 2019. / ISSEI KATO / REUTERS

Pour la cinquième journée consécutive, des centaines de militants prodémocratie manifestaient à l’aéroport international de Hongkong, mardi 13 août, a constaté l’Agence France-Presse. Les militants affluaient dans l’après-midi à l’aéroport, quelques heures à peine après que la chef de l’exécutif hongkongais pro-Pékin, Carrie Lam, a déclaré que leurs manifestations poussaient la ville sur « un chemin sans retour ». Les contestataires ont obstrué les allées menant aux zones d’embarquement des deux terminaux, mais des dizaines de passagers sont néanmoins parvenus à passer, ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse.

Ce nouveau rassemblement intervient au lendemain d’une mobilisation de milliers de manifestants dans cet important hub international. Lundi, l’autorité aéroportuaire a ainsi pris la décision rarissime d’annuler tous ses vols, après que des milliers de manifestants prodémocratie ont envahi le hall des arrivées.

Les enregistrements des passagers ont recommencé depuis l’aube, tandis que plusieurs centaines de manifestants rejoignaient le terminal du huitième aéroport mondial, pour une nouvelle mobilisation. Les manifestants vêtus de noir, signature du mouvement prodémocratie, clamaient « Lève-toi Hongkong, lève-toi pour la liberté », alors que des passagers se pressaient pour attraper leurs vols retardés la veille.

Nouvelle escalade dans la crise politique

S’agissant de la situation aéroportuaire, les écrans d’affichage indiquaient dans la matinée un redémarrage progressif des décollages et atterrissages. Mais l’activité était encore loin d’être revenue à la normale et de nombreux vols restaient annulés, dont environ 200 pour la seule compagnie hongkongaise Cathay Pacific, qui a demandé à ses voyageurs de reporter tout déplacement non essentiel.

Cathay Pacific a par ailleurs averti ses salariés qu’ils pourraient être licenciés s’ils soutenaient ou participaient aux manifestations « illégales » à Hongkong.

La fermeture du huitième aéroport international le plus fréquenté au monde (74 millions de passagers en 2018) a été décidée au moment où le gouvernement central chinois disait voir « des signes de terrorisme » dans la contestation qui agite sa région semi-autonome. Ces déclarations musclées ont marqué une nouvelle escalade dans la crise politique qui a éclaté début juin, la plus grave à Hongkong depuis la rétrocession du territoire par Londres à la Chine en 1997.

« Les manifestants radicaux de Hongkong ont à plusieurs reprises eu recours à des objets extrêmement dangereux afin d’attaquer des policiers, ce qui constitue déjà un crime grave et révèle de premiers signes de terrorisme », a accusé à Pékin le porte-parole du Bureau des affaires de Hongkong et Macao, Yang Guang.

Comme pour ajouter à la guerre des nerfs déclenchée par la presse de Pékin, deux médias publics, le Quotidien du peuple et le Global Times, émanations directes du Parti communiste au pouvoir, ont diffusé des vidéos censées représenter des blindés de transport de troupes se dirigeant vers Shenzhen, la métropole située aux portes de Hongkong. La vingtaine de véhicules de la police militaire « se prépare à des exercices de grande ampleur », a affirmé le Global Times.

45 personnes blessées

La mobilisation a vu ces dernières semaines se multiplier les affrontements entre policiers et manifestants. Les forces de l’ordre, au cours du dixième week-end de mobilisation, ont tiré des gaz lacrymogènes dans le métro et dans des rues commerçantes pleines de monde. Les protestataires ont répliqué en leur lançant des briques et leur retournant des lacrymogènes.

A l’instar de Joshua Wong, le jeune leader du mouvement, les militants prodémocratie dénonce également l’infiltration dans leurs rangs de policiers qui revêtiraient des tee-shirts noirs, signe de reconnaissance de leur mouvement.

Selon les autorités sanitaires, 45 personnes ont été blessées, dont deux sont dans un état grave. Parmi elles, une femme blessée au visage : des images la montrant allongée sur le sol, le visage baignant dans son sang, sont rapidement devenues virales, et ont même été placardées sous le slogan « œil pour œil », appelant à de nouvelles manifestations.

L’expression a également été peinte en chinois en plusieurs endroits de l’aéroport, où de nombreux manifestants portaient des bandeaux ou des bandages sur les yeux en solidarité avec la blessée. Lundi, les 5 000 manifestants qui ont mené leur quatrième jour de sit-in pacifique, brandissaient des pancartes où se lisait « Hongkong n’est pas sûr » ou « Honte à la police ». Ils accusent les policiers d’avoir recours à une violence disproportionnée dans le but de réprimer les rassemblements.

La haut-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU s’est dite, mardi, préoccupée par la répression des manifestations et a réclamé une enquête impartiale dans l’ex-colonie britannique. Michelle Bachelet « condamne toute forme de violence () et enjoint les autorités hongkongaises à ouvrir une enquête rapide, indépendante et impartiale » sur le comportement des forces de l’ordre, a fait savoir son porte-parole, Rupert Colville, lors d’une conférence de presse à Genève.

Pourquoi Hongkong est (encore) dans la rue
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