Pollution de l’air : la région Ile-de-France passe à l’offensive
Pollution de l’air : la région Ile-de-France passe à l’offensive
Par Laetitia Van Eeckhout
Le plan antipollution présenté vendredi au conseil régional prévoit notamment une écotaxe pour les poids lourds en transit.
Les Parisiens ne sont pas les seuls en Ile-de-France à respirer un air vicié. « 1,5 million de Franciliens, soit 12 % des habitants de la région sont exposés chaque jour à des niveaux de pollution qui ne respectent pas les normes », n’a de cesse de rappeler la nouvelle présidente (Les Républicains) du conseil régional, Valérie Pécresse.
Cette dernière est bien décidée à passer à la vitesse supérieure sur ce dossier, selon elle, trop longtemps délaissé par l’exécutif régional. Vendredi 17 juin, Mme Pécresse devait soumettre au conseil régional son plan pour la qualité de l’air (2016-2021) auquel 150 millions d’euros (hors transports) seront alloués, dont 10 millions dès cette année.
La région va déjà débloquer 2,6 millions d’euros pour venir en aide aux artisans et aux commerçants concernés par les toutes prochaines restrictions de circulation qui s’appliqueront dans la capitale.
Le 1er juillet, la mairie de Paris passera en effet à la deuxième phase de son action établissant des « zones de circulation restreinte ». Après les bus, les cars et les poids lourds anciens (avant 2001), bannis depuis le 1er juillet 2015, ce sont désormais les véhicules individuels et utilitaires antérieurs à 1997, ainsi que les deux-roues motorisés avant 1999, qui seront à leur tour interdits de circulation en semaine de 8 heures à 20 heures.
Trente-six mesures
La région va donc aider les commerçants concernés à opter pour des véhicules électriques ou fonctionnant au gaz naturel. Le dispositif ne sera pas cumulable avec celui mis en place par la mairie de Paris. Comme ce dernier toutefois, la prime régionale sera plafonnée à 3 000 euros pour un véhicule utilitaire, 6 000 euros pour un fourgon et 9 000 euros pour un poids lourd et sera accessible aux entreprises de moins de dix salariés, mais sur un périmètre élargi à toute l’Ile-de-France. Au total, 3 000 véhicules pourraient en bénéficier.
« La région se doit de veiller aux conséquences sur l’ensemble de la région, de telles mesures. Depuis la nouvelle loi sur l’organisation territoriale de la République, elle est chef de file sur les questions de qualité de l’air », rappelle Chantal Jouanno, vice-présidente du conseil régional, chargée de l’écologie et du développement durable.
Le plan francilien pour la qualité de l’air, qui compte trente-six mesures, met par ailleurs l’accent sur le développement des transports en commun et leur « verdisation ». La Région prévoit notamment, sous l’égide du Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF), l’affectation de 1 000 nouveaux bus à la grande couronne. Elle veut aussi accélérer la mise en place des bus GNV – utilisant le gaz naturel comme carburant – et surtout des bus électriques. Son objectif est d’atteindre 100 % de bus propres en Ile-de-France en 2025.
Un enjeu de santé publique
Le métro, où l’air n’est pas plus sain que celui que l’on respire à l’extérieur, est aussi concerné. Il y a là aussi un enjeu fort de santé publique auquel la région entend s’attaquer en travaillant avec la RATP en finançant l’expérimentation de dispositifs d’aspiration des particules émises lors du freinage des rames.
La région s’apprête aussi à lancer, dès septembre, en partenariat avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), un fonds « Air-Bois », doté de 2 millions d’euros. Il permettra d’accorder aux Franciliens utilisant le bois comme énergie principale pour se chauffer une prime d’environ 1 000 euros pour le remplacement d’un appareil de chauffage ancien (avant 2002), d’un foyer ouvert ou d’un vieux poêle.
De fait, selon Airparif, l’observatoire de la qualité de l’air en Ile-de-France, le chauffage au bois résidentiel représente 23 % des émissions totales de PM10 (celles d’un diamètre inférieur à 10 microns) dans la région et 32 % de celles de PM2,5.
Une écotaxe francilienne pour les poids lourds
Une des mesures les plus emblématiques du plan air régional reste la volonté de mettre en place une écotaxe pour les poids lourds en transit. « C’est probablement celle qui aura le plus d’impact, soutient sa vice-présidente. Aujourd’hui, le principe pollueur-payeur ne s’applique pas aux poids lourds. Il serait pourtant normal qu’ils participent aux financements des mesures de lutte contre la pollution à laquelle ils contribuent. »
Le plan pour la qualité de l’air prévoit que la présidence de la région soit « mandatée pour définir avec l’Etat les dispositions nécessaires à la mise en œuvre de l’écotaxe (…), ainsi que les modalités permettant de garantir l’équité et la conformité avec le cadre de la réglementation communautaire ».
La région n’a pas en effet le pouvoir de mettre en place seule ce dispositif. Mais Mme Jouanno n’envisage pas que le gouvernement ne suive pas et espère bien une mise en œuvre de cette mesure dès 2018. « Nous avons déjà les portiques [installés pour la feu écotaxe nationale] : plutôt que de les démonter, utilisons-les », relève-t-elle.
Dans un courrier du 18 mars à l’Association des régions de France (ARF), la ministre de l’écologie, Ségolène Royal, a assuré que « les régions ont toute légitimité à conduire des réflexions approfondies » sur le sujet et les a invitées à faire des propositions. L’écotaxe francilienne pourrait rapporter, selon les estimations de l’exécutif régional, quelque 100 millions d’euros par an.
- Une baisse de la vitesse sur 46 km de routes dès le 4 juillet La vitesse va baisser de 20 km/h dès cet été sur 46 km de routes nationales et d’autoroutes en Ile-de-France pour lutter contre la pollution et les bouchons, annonce Le Parisien vendredi 17 juin. A partir du 4 juillet, quatre portions de routes nationales et d’autoroutes, où roulent quotidiennement près de 400 000 véhicules, verront leur vitesse limite réduite de 20 km/h. « Cela devrait permettre de limiter l’effet accordéon du trafic et donc de retarder la création de bouchons », explique au journal le directeur régional et interdépartemental adjoint de l’Equipement et de l’aménagement Ile-de-France, Eric Tanays, qui attend aussi « des bénéfices en termes de sécurité routière, car il y aura moins de coups de frein brutaux et moins de chocs arrière ».