Union africaine : la bataille pour la succession de Nkosazana Dlamini-Zuma relancée ?
Union africaine : la bataille pour la succession de Nkosazana Dlamini-Zuma relancée ?
Par Fanny Joachim
Faute de candidats jugés à la hauteur, les candidatures à la présidence de la Commission de l’UA pourraient être réouvertes ce week-end à Kigali.
Qui pour succéder à Nkosazana Dlamini-Zuma à la tête de la Commission de l’Union africaine ? La Sud-Africaine n’a pas fait l’unanimité durant son mandat de quatre ans. Absentéisme, manque de réactivité, priorité donnée à sa propre carrière nationale plutôt qu’aux urgences continentales : les reproches sont nombreux et d’aucuns se réjouissaient de voir son poste bientôt confié à quelqu’un d’autre.
Or les trois candidats officiels à la succession de Nkosazana Dlamini-Zuma, eux aussi, décoivent. Ont été retenus, à la clôture des candidatures le 31 mars, la ministre des affaires étrangères du Botswana, Pelonomi Venson-Moitoi, son homologue équato-guinéen, Agapito Mba Mokuy, et l’Ougandaise Speciosa Wandira-Kazibwe, envoyée spéciale de l’ONU pour la lutte contre le sida. « Des candidats de troisième classe », entend-on dire chez les membres de l’organisation dont le siège est à Addis-Abeba.
Comme cette liste courte n’a convaincu personne, plusieurs membres de l’organisation panafricaine souhaitent désormais que le processus de candidature soit rouvert. L’occasion pour ce faire est le 27e sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine, qui doit se tenir les 17 et 18 juillet à Kigali, au Rwanda.
Dans cette perspective, une personnalité se profile déjà. L’homme politique et intellectuel sénégalais Abdoulaye Bathily bat ouvertement campagne dans les coulisses du Centre de conférence flambant neuf de la capitale rwandaise, où se déroule la conférence préliminaire au sommet de dimanche.
Abdoulaye Bathily, 69 ans, ici en 2007, représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon pour l’Afrique centrale, bat bat désormais campagne pour prendre la tête de la présidence de la commission de l’Union africaine. | SEYLLOU DIALLO/AFP
M. Bathily, 69 ans, représentant spécial du secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon pour l’Afrique centrale, serait le favori de plusieurs dirigeants africains. Et d’abord de Macky Sall, le président Sénégalais, dont il est proche. Son pays, pour lequel il fut ministre d’Etat chargé des affaires africaines de 2012 à 2013, aurait ainsi l’intention de présenter officiellement sa candidature. Par ailleurs, les liens de M. Bathily avec le nouveau président burkinabé Roch Marc Kaboré ou le président malien Ibrahim Boubacar Keïta sont de notoriété publique.
Les poids lourds de l’Union africaine que sont l’Algérie et l’Afrique du Sud ont d’abord penché en faveur de la Botswanaise Pelonomi Venson-Moitoi. Mais si le processus de candidature devait être rouvert, ces deux pays soutiendront-ils le diplomate sénégalais ? Abdoulaye Bathily en est convaincu, qui multiplie les contacts à Kigali, prospectus en main.
Le document de quatre pages détaille son parcours : une formation universitaire au Royaume-Uni, vingt-huit années d’enseignement à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, des engagements syndicaux et militants et les différents postes ministériels qu’il a occupés dès 1993. Ses proches affirment qu’il apporterait un « supplément d’âme » à l’organisation panafricaine, mettant en avant son expertise sur « le climat, l’énergie, la gouvernance et la sécurité »
Les tractations vont bon train
C’est en quelque sorte la « méthode Adesina ». Le nouveau président de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adesina, n’avait pas hésité à inonder les réunions annuelles de la BAD en mai 2015 de prospectus verts vantant ses qualités et son parcours professionnel. Il avait finalement été élu par 58,1 % des voix.
Alors que le nom Ramtane Lamamra, actuel ministre des affaires étrangères algérien, circulait comme candidat potentiel à la présidence de la Commission de l’UA, son pays a finalement renoncé à présenter un candidat. D’après Liesl Louw-Vaudran, experte de l’Union africaine pour le cercle de réflexion ISS Africa, « M. Lamamra avait une chance d’être mis en avant. C’était la grosse histoire du précédent sommet de janvier, mais il ne l’a pas fait. Il aurait été grand favori ! ».
Les tractations vont bon train depuis le sommet d’Addis-Abeba de janvier. Hormis la candidature désormais affichée d’Abdoulaye Bathily circule désormais le nom de l’ancien président tanzanien (2005-2015), Jakaya Kikwete. Par ailleurs, le haut représentant rwandais pour le Fonds de la paix de l’UA, Donald Kaberuka, ancien président de la BAD, serait aussi sur les rangs, tout comme Carlos Lopez, de Guinée-Bissau, actuellement secrétaire exécutif de la commission économique pour l’Afrique des Nations unies. Si, comme beaucoup le pensent, le processus de candidature devait être réellement rouvert à Kigali, des scénarios discordant continuent d’être avancés à la veille de ce 27e sommet. Au lieu d’un vote initialement prévu ce week-end, le choix final pourrait être reporté de plusieurs mois, au plus tard jusqu’au nouveau sommet de l’UA, en janvier 2017, à Addis-Abeba.