A Washington, en août 2015. | KAREN BLEIER / AFP

Fin du feuilleton. Ce lundi 25 juillet, Yahoo! devrait officialiser la vente de ses activités Internet à Verizon, le premier opérateur mobile américain. Une annonce était attendue juste avant l’ouverture des échanges à Wall Street, affirment plusieurs médias américains. Cela mettrait fin à plusieurs mois de suspense. Et concrétiserait surtout l’échec de Marissa Mayer, l’ancienne employée vedette de Google recrutée en juillet 2012 pour relancer le pionnier du Web.

Verizon devrait dépenser 4,8 milliards de dollars (4,4 milliards d’euros) pour mettre la main sur les nombreux services de Yahoo! (mail, actualités, finance, etc.), sur son moteur de recherche, sur sa régie publicitaire et sur ses biens immobiliers. Sans ces actifs, la société de Sunnyvale (Californie) sera, elle, réduite à une coquille vide.

Toujours cotée en Bourse, elle se contentera désormais de reverser à ses actionnaires les dividendes générés par ses participations de 15 % dans Alibaba, le géant chinois du commerce en ligne, et de 35,5 % de Yahoo! Japan, sa filiale japonaise. A terme, cette dernière, valorisée à environ 9 milliards de dollars avant impôts, pourrait également être cédée.

Verizon entre dans une autre dimension

La marque Yahoo!, symbole des premiers pas de l’Internet commercial, ne va pas disparaître. Elle va être intégrée à AOL, autre ancienne gloire du Web que Verizon a acquis en 2015 pour 4,4 milliards de dollars. Le nouvel ensemble sera dirigé par Tim Armstrong, l’actuel patron d’AOL, passé lui aussi par Google. Mme Mayer devrait ainsi quitter ses fonctions, partant avec un parachute doré estimé à plus de 50 millions de dollars. Parallèlement, un plan social pourrait accompagner ce rachat, alors que Yahoo! compte encore près de 9 000 employés.

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Cette opération va permettre à Verizon de devenir le troisième acteur de la publicité en ligne aux Etats-Unis, avec une part de marché estimée à 5,2 % cette année par le cabinet eMarketer. L’opérateur restera encore à bonne distance de Google (38,7 %) et de Facebook (15 %). Mais il espère atteindre une taille critique lui permettant de mieux rivaliser, en particulier dans la vidéo. Objectif : compenser la stagnation de son chiffre d’affaires généré par les abonnements mobiles.

La stratégie a été enclenchée en 2015. En rachetant AOL, Verizon a récupéré plusieurs sites Internet d’envergure, comme le Huffington Post, TechCrunch et Engadget. En juin 2015, le groupe a également acquis la majorité des activités publicitaires de Microsoft. Il a aussi lancé sa propre plate-forme de vidéos, baptisée go90. Il dépense depuis énormément pour promouvoir son service et pour recruter des créateurs de contenus originaux.

L’acquisition de Yahoo! va cependant le faire entrer dans une autre dimension. Le portail devrait générer 2,8 milliards de dollars de recettes publicitaires cette année, selon eMarketer, contre seulement 1,4 milliard pour Verizon. Bien qu’en perte de vitesse, les services de Yahoo! attirent encore un milliard d’internautes par mois. L’opérateur va aussi récupérer plusieurs outils publicitaires, qu’il pourra alors combiner avec ceux qu’il possède déjà. Notamment Bright-Roll, plate-forme de publicité vidéo, et Flurry, service d’analyse de données sur mobile.

Un long déclin

Fondé en 1994, Yahoo! a d’abord été un gigantesque annuaire qui référençait les meilleures adresses de la Toile. Le site a par la suite évolué sous la forme d’un portail, multipliant les services pour attirer et conserver les internautes. Mais il a été dépassé par l’émergence de Google puis de Facebook, qui ont bouleversé les habitudes. Yahoo! a perdu son statut de porte d’entrée du Web, qui faisait toute sa valeur. Début 2000, juste avant l’éclatement de la bulle Internet, sa valorisation boursière culminait à 125 milliards de dollars.

Marissa Mayer aura stoppée l’hémorragie mais n’a pas trouver de recette miracle pour renouer avec la croissance

La suite n’aura été qu’un long déclin, marqué par une succession de directeurs généraux et par le rejet, en 2008, d’une offre de rachat de 45 milliards de dollars émise par Microsoft. En juillet 2012, l’entreprise tente un dernier pari. Elle débauche Mme Mayer, véritable star chez Google. Si elle est parvenue à stopper l’hémorragie, la dirigeante n’a en revanche pas trouvé la recette miracle pour renouer avec la croissance. En 2015, le chiffre d’affaires net de Yahoo a encore reculé de 7 %.

Débauchée de Google, Marissa Mayer a essayé de sauver Yahoo! en menant de nombreuses acquisitions et en lançant de nouveaux services. | Julie Jacobson / AP

Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. Mme Mayer a en effet mené de nombreuses acquisitions et lancé de nouveaux services. Elle a tenté de réorienter la société vers la vidéo, le mobile, la publicité en ligne et les réseaux sociaux. Mais la majorité de ses paris ont échoué, à l’image de Tumblr, le réseau social racheté pour 1,1 milliard de dollars en 2013. Depuis, sa valeur a été dépréciée à hauteur de 712 millions de dollars.

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Le coup de grâce est intervenu fin 2015 lorsque Yahoo! a abandonné un projet de scission de sa participation dans Alibaba, réclamée par de nombreux investisseurs. Mme Mayer pensait avoir trouvé une solution pour éviter de payer des impôts, estimés à environ 10 milliards de dollars. Mais le tour de passe-passe imaginé s’est heurté à la méfiance de l’administration fiscale américaine. Une fois l’opération écartée, le démantèlement de Yahoo! n’était alors plus qu’une question de mois.