Seulement 38 % des thèses en sciences humaines et sociales sont rémunérées
Seulement 38 % des thèses en sciences humaines et sociales sont rémunérées
Par Adrien de Tricornot
Le nombre de doctorants en SHS + a diminué entre 2011 et 2015, tandis qu’il demeure stable dans les autres disciplines, où 92 % des thèses sont financées par un contrat de recherche.
A l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne. | Camille Stromboni
Le nombre de « thésards » en sciences humaines et sociales a diminué entre 2011 et 2015, et ceux-ci sont désormais moins nombreux que les doctorants des autres disciplines : c’est ce que révèlent les indicateurs publiés par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, mardi 29 novembre. Une situation nouvelle, alors que les sciences humaines et sociales, au sens large (SHS +, dans les statistiques du ministère), continuent d’attirer la majorité des étudiants de l’université : 60 % sont en effet inscrits en humanités (lettres, langues, art, philosophie, histoire, etc.), en sciences sociales (sociologie, démographie, ethnologie, anthropologie, etc.) ou en sciences juridiques, économiques et politiques.
Les doctorants des autres disciplines (mathématiques, physique, chimie, sciences du vivant dont médecine, sciences et techniques de l’information et de la communication, ainsi que les sciences et techniques des activités physiques et sportives STAPS) sont ainsi majoritaires parmi les jeunes chercheurs en quête du diplôme bac + 8, le « Graal » de l’enseignement supérieur. Et l’écart est encore plus marqué si l’on considère les entrées en première année de doctorat : 7 300 en SHS + (– 13,8 %), 9 800 dans les autres disciplines.
Nombre total de doctorants et nombre d’inscrits en première année de formation pour les années universitaires 2011-2012 et 2015-2016. Nombre de diplômés en 2015. | MENESR - SIES enquête sur les écoles doctorales 2016.
Une des principales explications réside dans le financement de ces années de recherche effectuées après le master. Quand 92 % des doctorants en sciences exactes voient leurs thèses financées par un contrat de recherche (soit un minimum de 1 400 euros net par mois depuis la rentrée 2016), ce n’est le cas que pour 38 % de leurs camarades de SHS + :
Le financement des doctorants inscrits en première année de doctorat, par discipline, au cours de l’année universitaire 2014-2015. | MENESR – SIES : Enquête sur les écoles doctorales 2016.
Le non-financement des recherches effectuées par les thésards est dénoncé depuis longtemps par les associations de doctorants en sciences humaines. La Confédération des jeunes chercheurs (CJC), qui regroupe une quarantaine d’associations de doctorants et de docteurs de toutes les disciplines, rappelle aussi régulièrement que le doctorat est une expérience professionnelle de recherche et qu’en conséquence les doctorants doivent être considérés comme des jeunes chercheurs et non comme des étudiants, ce que reconnaissent les textes européens.
Ce principe est aussi inscrit, depuis 2006, dans la loi et la réglementation, si bien que « le jeune chercheur doit avoir accès aux moyens de travail nécessaires à la réalisation de la recherche, dans les mêmes conditions que ses collègues », plaide constamment la CJC. On en est encore loin, puisque la précarité marque encore le quotidien de la plupart des jeunes chercheurs en SHS.
Le ministère avait annoncé en juillet une série d’initiatives pour revaloriser les sciences humaines et sociales. Mercredi 29 novembre, le secrétaire d’Etat, Thierry Mandon, a fait un nouveau geste, annonçant une enveloppe de 8 millions d’euros en faveur de l’Agence nationale de recherche (ANR), destinés à des projets de recherche en SHS. De l’argent frais qui pourrait permettre de financer plus de contrats pour les doctorants.