Le guépard, la girafe et le rhinocéros noir risquent de disparaître en Afrique
Le guépard, la girafe et le rhinocéros noir risquent de disparaître en Afrique
LE TEMPS.CH
Trois espèces caractéristiques de la savane africaine sont menacées de disparition par la fragmentation de leur habitat et par les activités humaines.
L’herbe jaune recouvre la plaine parsemée d’arbres secs en ombres chinoises sur un ciel dégagé. Le paysage de la savane africaine ne pourrait être complet sans les profils élancés d’un groupe de girafes, les oreilles poilues d’un jeune guépard dépassant d’un taillis et la forme trapue d’un rhinocéros cornu. Pourtant cette image d’Epinal pourrait bien devoir être effacée de notre esprit au vu de la menace d’extinction qui plane sur les têtes des espèces citées.
Le guépard et la girafe appartiennent tous les deux à la liste rouge des espèces considérées comme « vulnérables » par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui est chargée de suivre l’état des espèces dans le monde. Le rhinocéros noir compte quant à lui parmi les animaux dont la survie est « gravement menacée », selon la même organisation.
Le guépard court à sa perte
Le 26 décembre, une étude menée un par un groupe international de chercheurs et publiée dans la revue scientifique PNAS a révélé le risque élevé de disparition encouru par le félin tacheté. La population de guépards sauvages en Afrique – soit 99 % des guépards dans le monde – a été estimée par les spécialistes à environ 7 100 individus, répartis sur un territoire qui ne représente plus que 9 % de leur aire d’occupation historique. Or le guépard (Acinox jubatus) est un animal qui a besoin d’un grand territoire pour survivre et ne pas subir la concurrence des autres espèces de prédateurs.
Les guépards se concentrent surtout dans la zone frontière entre la Tanzanie et le Kenya et dans la région sud-africaine. Selon les auteurs de l’étude, moins d’un quart des guépards vivent dans des zones protégées, la majorité des animaux étant donc exposée à des menaces multiples.
Le cas du Zimbabwe
Dans un communiqué, la Société zoologique de Londres (ZSL) et l’organisation de défense de l’environnement Wildlife Conservation Society (WCS), qui ont mené les travaux, indiquent que le nombre de guépards est passé de 1 200 à 170 animaux au Zimbabwe sur une période de seize ans, soit une chute de 85 %. C’est pourquoi les auteurs plaident pour une réévaluation du statut de conservation du guépard. Ils appellent à ce que l’animal soit considéré comme une espèce « menacée » par l’UICN et non plus seulement comme « vulnérable ».
« Notre étude est l’analyse la plus exhaustive qui existe aujourd’hui, explique Sarah Durant de la ZSL/WCS et auteure principale de l’étude. Etant donné la nature secrète de ce félin insaisissable, il a été difficile de réunir des données solides sur cet animal, au point que sa situation critique a pu être négligée. Nos résultats (…) montrent que le guépard est bien plus vulnérable que ce l’on pensait. »
Principale menace, la fragmentation de l’habitat
La principale menace qui pèse sur cette espèce est la fragmentation de son habitat, selon l’UICN, qui précise aussi sur son site que les guépards qui vivent dans les zones non protégées sont en concurrence avec les espaces utilisés pour l’élevage et l’agriculture. Il peut arriver qu’ils tuent des animaux de bétail, provoquant leur traque par les fermiers, qui les tuent. La population de leurs proies sauvages a aussi tendance à diminuer à cause de la pression exercée par les humains sur les territoires naturels (routes, tourisme non régulé, etc.), ce qui fragilise le mode de vie des guépards.
Enfin, le braconnage à des fins de commerce illégal menace aussi la survie de l’espèce. En effet, le guépard, recherché pour sa peau, est aussi de plus en plus à la mode comme animal de compagnie dans les Etats du Golfe, qui sont par ailleurs signataires de la Cites (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction), qui interdit le commerce international de cet animal.
Les girafes menacées par les activités humaines
Parmi les neuf sous-espèces de girafes réparties sur 21 pays, cinq voient leur population diminuer de manière inquiétante. La girafe emblématique de la savane africaine (Giraffa camelopardalis), le plus grand animal terrestre, est menacée d’extinction, selon un communiqué de l’UICN publié début décembre. L’organisation a fait passer son statut de « peu préoccupant » à « vulnérable » sur sa liste rouge des espèces en danger.
La plupart des girafes vivent dans le sud et l’est du continent africain, avec de petites poches de territoire à l’ouest et au centre. Leur population a décliné dramatiquement de 36 à 40 %, passant de près de 155 000 individus en 1985 à environ 97 500 en 2015, rapporte l’UICN. A l’origine de ce désastre, le braconnage et la perte de leur habitat, menacé par l’agriculture et l’exploitation minière, ainsi que les poussées d’instabilité civile et sociale, explique l’organisation.
Moins de 5 000 rhinocéros noirs
La savane accueille certains des plus gros animaux terrestres, comme les éléphants, les hippopotames et les rhinocéros. Tous sont menacés, et un plus particulièrement : le rhinocéros noir (Diceros bicornis). Cette espèce a perdu 97,6 % de sa population depuis 1960, atteignant son seuil le plus bas en 1995 avec seulement 2 410 individus recensés, rapporte l’UICN. Depuis vingt ans, la population augmente légèrement ; elle atteignait 4 880 individus fin 2010.
Pendant la majeure partie du XXe siècle, le rhinocéros noir a été l’espèce de rhinos qui a compté le plus d’individus dans le monde, avec un maximum estimé à 850 000 bêtes. La colonisation du territoire par les habitations humaines et l’agriculture, associée à la chasse sans répit de l’animal pour ses cornes, a divisé ce chiffre par sept ou huit, pour arriver à environ 100 000 individus à l’aube des années 1960.
Depuis, le braconnage des cornes pour le commerce illégal d’ivoire est le principal danger qui menace la survie des rhinocéros noirs d’Afrique. La demande en cornes de rhinocéros est principalement liée à l’utilisation de son ivoire dans la médecine chinoise et à des fins d’ornementation.