Le réalisateur iranien Asghar Farhadi, lors du 69e festival de Cannes, le 22 mai 2017. | ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP

Le décret du président Donald Trump bloquant l’accès aux Etats-Unis de ressortissants de sept pays musulmans et de réfugiés touche le milieu du septième art. Le cinéaste iranien Asghar Farhadi, nommé aux Oscars dans la catégorie meilleur film étranger, a annoncé dimanche 29 janvier, qu’il ne se rendrait pas à la cérémonie de remise des prix.

Ashgar Farhadi comptait se rendre à la cérémonie, a-t-il expliqué dans un communiqué diffusé par les agences de presse iraniennes, mais les décrets adoptés vendredi par l’administration Trump pour interdire aux ressortissants d’Iran, de Syrie, du Yémen, de Libye, d’Irak, de Somalie et du Soudan d’entrer aux Etats-Unis ont changé la donne.

« Mon intention n’était pas de ne pas assister à la cérémonie ou de la boycotter pour montrer mes objections (aux politiques de Trump), car je sais que beaucoup de gens dans l’industrie américaine du cinéma et au sein de l’Académie des arts et sciences du cinéma sont opposés au fanatisme et à l’extrémisme qui règnent plus que jamais aujourd’hui. »

« Mais il semble maintenant que la possibilité même de ma présence soit soumise à des “si” et des “mais” et ce n’est pas acceptable pour moi, même si l’on venait à faire exception pour mon voyage », a-t-il ajouté.

« Des images irréalistes et effrayantes »

Le dernier film d’Ashgar Farhadi, Le Client, est présélectionné pour l’Oscar du meilleur film étranger. En 2012, le cinéaste iranien avait déjà remporté ce prix avec La Séparation. Celui dont les films sont vus comme un pont entre l’Iran et les Etats-Unis a regretté que les tenants d’une ligne dure dans ces deux pays agissent avec la même mentalité.

« Durant des années, des deux côtés de l’océan, des groupes de gens adeptes d’une ligne dure ont essayé de présenter à leur peuple des images irréalistes et effrayantes des gens d’autres cultures afin que les différences deviennent des désaccords, les désaccords des inimitiés et les inimitiés des peurs », a regretté le cinéaste.

« Instiller la peur de l’autre est un des moyens préférés pour justifier des comportements extrémistes et fanatiques par des gens étroits d’esprit », a-t-il encore déploré.

Les célébrités montent au créneau

L’actrice iranienne Taraneh Alidousti, à l’affiche du film Le Client, avait annoncé jeudi qu’elle boycotterait la cérémonie des Oscars pour protester contre les mesures « racistes » du président américain en matière d’interdiction de visas.

Durant le week-end, le tout Hollywood s’est offusqué sur les réseaux sociaux contre le décret de Donald Trump. Dans un tweet, l’actrice Alyssa Milano a présenté « son meilleur ami musulman », dont les parents sont des réfugiés palestiniens. Le réalisateur Michael Moore, lui, s’est excusé au nom des « dizaines de millions d’Américains » qui n’ont pas voté pour Donald Trump.

Dans un message publié sur Facebook, Mo Farah, double champion olympique à Londres sur le 5 000 m et le 10 000 m, qui s’entraîne actuellement en Ethiopie, confie sa crainte de ne pas pouvoir retourner aux Etats-Unis, où il vit depuis six ans avec son épouse et ses enfants.

« Je vis aux Etats-Unis depuis six ans. Je paie mes impôts et élève quatre enfants dans un pays qu’ils considèrent être le leur. Désormais, on dit à moi et à beaucoup d’autres que nous ne sommes plus les bienvenus. Je vais devoir dire à mes enfants que papa ne va peut-être pas pouvoir rentrer à la maison, c’est très troublant », s’inquiète le citoyen britannique d’origine somalienne, dont il a gardé la nationalité.

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