De nouvelles milices armées ont vu le jour dans les provinces méridionales d’Equatoria au Soudan du Sud, depuis la flambée de violences de juillet 2016 dans la capitale Juba, a déploré vendredi le médiateur régional Festus Mogae devant la presse à Nairobi.

« De nouveaux groupes ont vu le jour qui n’existaient pas avant. De nouvelles milices. Ce sont de nouveaux développements depuis juillet, des développements indésirables », a déclaré l’ancien président du Botswana et président de la Commission de surveillance et d’évaluation de l’accord de paix (JMEC) d’août 2015.

« Il y a des allégations selon lesquelles certains de ces groupes ciblent des Dinka », l’ethnie du président sud-soudanais Salva Kiir, dont les troupes ont été à leur tour accusées d’avoir perpétré des assassinats à caractère ethnique, notamment à Yei (Equatoria du centre).

Des provinces auparavant globalement épargnées

Les provinces d’Equatoria (Ouest, Est et Centre) avaient été globalement épargnées par les combats de la guerre civile déclenchée à partir de décembre 2013 et opposant les troupes de Salva Kiir aux hommes de l’ancien vice-président Riek Machar.

Mais ces six derniers mois, elles ont été le théâtre de violences parmi les pires du pays, notamment à Yei, à une centaine de km au sud-ouest de Juba, poussant des dizaines de milliers de personnes à se réfugier en Ouganda voisin.

Ces atrocités ont suscité l’émoi de la communauté internationale. Des experts de l’ONU rapportaient début décembre qu’un « nettoyage ethnique » était en cours dans plusieurs régions du Soudan du sud, pointant du doigt les exactions des soldats gouvernementaux.

M. Mogae a décrit une mosaïque de groupes aux agendas variés, témoignant de la complexité du conflit sud-soudanais.

Certains sont des miliciens animés par un désir de vengeance sur des lignes ethniques. D’autres incarnent un sentiment de marginalisation et d’exclusion au regard de l’accord de paix d’août 2015, entre principalement les Dinka de Salva Kiir et les Nuer de Riek Machar. D’autres encore, a poursuivi M. Mogae, sont tout simplement des criminels, qui se sont fait une spécialité de piller l’aide humanitaire.

« C’est pourquoi nous disons au gouvernement : faites quelque chose. Les Équatoriens sont des citoyens à part entière », a poursuivi M. Mogae.

Indépendant depuis 2011, le Soudan du Sud a plongé en décembre 2013 dans une guerre civile ayant fait des dizaines de milliers de morts et plus de 3 millions de déplacés. Un accord de paix signé en août 2015 avait fait naître de timides espoirs de pacification, mais il est moribond depuis les combats de juillet 2016 à Juba.

M. Mogae, qui s’exprimait devant l’association des correspondants de la presse étrangère au Kenya, a également jugé que l’actuel gouvernement d’unité nationale n’était pas assez représentatif.

« Le gouvernement doit être plus inclusif. Il doit inclure des gens du camp de Riek Machar. Il doit inclure des Equatoriens », a estimé le médiateur.

A la suite des combats de juillet, Riek Machar avait dû fuir la capitale et il vit depuis en exil en Afrique du Sud. L’opposition s’était alors scindée en deux factions : l’une loyale à M. Machar, qui n’est plus représentée dans les institutions de transition, l’autre favorable à Taban Deng Gaï, nommé vice-président du pays à la place de M. Machar.

« Il est clair que la majorité de l’opposition est toujours derrière Riek Machar », a déclaré M. Mogae, estimant que l’ex-chef rebelle avait l’ascendant sur environ 75 % des troupes rebelles dans le pays, contre 25 % pour Taban Deng Gaï.