Benoît Hamon lors de la conférence de presse où il a présenté son équipe de campagne, à Paris le 11 février. | PHILIPPE LOPEZ / AFP

Une ancienne manufacture sur trois étages, au cœur d’un quartier central, populaire et bobo du 10e arrondissement. C’est dans cet espace de co-working ouvert et lumineux (poutres blanches et grandes verrières), nouveau siège de campagne de Benoît Hamon, que ce dernier a dévoilé samedi 11 février l’équipe qui l’accompagnera dans la bataille présidentielle. Aux premières loges de cette conférence de presse : le premier secrétaire du parti Jean-Christophe Cambadélis, la maire de Paris Anne Hidalgo – pendue aux micros pour dire tout le bien qu’elle pense de ce candidat qui veut « faire de la politique autrement » – ou l’ancienne ministre de la famille Dominique Bertinotti, grande déçue du quinquennat. Mais pas d’autres poids lourds du Parti socialiste (PS) ou du gouvernement sous les voûtes en acier du QG, en cet après-midi gelé de février.

Investi il y a une semaine par la Belle alliance populaire, le député des Yvelines – qui plafonne à la quatrième place dans les sondages mais qui devance Jean-Luc Mélenchon – a présenté un organigramme ouvert à la société civile et aux autres sensibilités du PS, constitué avec le souci de rassembler sans se renier. Parmi ses sept porte-parole, figurent ainsi deux proches de François Hollande, la sénatrice Frédérique Espagnac (qui a eu du mal à faire le deuil de la candidature du président sortant) et le député Sébastien Denaja (qui avait intégré l’équipe de Vincent Peillon pendant la primaire). Mais aussi deux soutiens d’Arnaud Montebourg : l’ex-ministre de la culture Aurélie Filippetti et le frondeur Jérôme Guedj.

Un seul proche de Manuel Valls dans son équipe

Le sénateur Luc Carvounas, proche de Manuel Valls, hérite quant à lui de l’animation d’un « conseil parlementaire » – il est le seul vallsiste représenté à ce stade –, tandis que son collègue David Assouline, soutien de Vincent Peillon, sera en charge de la « riposte ». De son côté, le hollandais Rachid Temal aura la charge stratégique de la mobilisation du parti (meetings, etc.). « Je ne leur ai pas demandé de venir avec leur étiquette Peillon, Montebourg, Valls ou Hollande », a tenté de faire valoir Benoît Hamon, qui s’est défendu d’avoir élaboré un « casting » respectant toutes les sensibilités. « Ce n’est pas un congrès du PS », a assuré celui qui se voit précisément reprocher de faire une campagne de congrès plutôt qu’une campagne présidentielle.

Le siège de campagne de Benoît Hamon a été installé dans une ancienne manufacture située au cœur du 10e arrondissement. | PHILIPPE LOPEZ / AFP

Le candidat du PS a également annoncé la mise en place d’une « gouvernance citoyenne ». Il sera entouré de sept personnalités de la société civile, censées l’alimenter en idées et propositions pendant la campagne : l’économiste Thomas Piketty (question européenne), la sociologue Dominique Méda (travail), l’économiste Julia Cagé (questions économiques), Salah Amokrane (justice sociale et égalité), Nicolas Hazard (entrepreneuriat), l’épidémiologiste Alfred Spira (santé) et François Gémenne (environnement).

Ce « laboratoire d’idées » sera animé par la philosophe Sandra Laugier, proche du mouvement Nuit debout et qui s’est souvent montrée extrêmement critique avec la « gauche de gouvernement » qu’elle a accusée de « s’effondrer à force de reniements, d’inconsistance ou de conflits mettant cruellement à nu les appétits de pouvoir » (Qu’est-ce que la gauche ?, dirigé par Cécile Amar et Marie-Laure Delorme, Fayard, 2017).

Rassembleur, mais en rupture nette avec le quinquennat

Benoît Hamon dévoilera plus tard la composition de son « conseil politique », qui réunira les « chapeaux à plume » du PS, dont plusieurs ministres comme Axelle Lemaire ou Mathias Fekl. Il a installé samedi un « conseil citoyen » (associant quarante citoyens bénévoles tirés au sort) et un « conseil des territoires », dont s’occupera le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel. « Je veux que la campagne anticipe ce que sera la gouvernance du pays », a expliqué le député des Yvelines, multipliant les adjectifs louangeurs et empreints de bons sentiments pour décrire une campagne qu’il souhaite « ouverte, collaborative, participative, horizontale, bienveillante… »

Mais si le candidat du PS a tenté de s’afficher comme rassembleur, sa campagne se place résolument à gauche et en rupture nette avec le quinquennat de François Hollande. Plane surtout l’ombre de Martine Aubry, qui l’a soutenu dès le lendemain du premier tour de la primaire, fin janvier. L’ancien directeur de cabinet de la maire de Lille, Jean-Marc Germain, codirigera cette campagne avec le député PS de Seine-Saint-Denis, Mathieu Hanotin, à la manœuvre pendant la primaire. Quant au fidèle lieutenant de la maire de Lille, François Lamy, présent au QG samedi, il a hérité de la charge stratégique de la relation avec la gauche et les écologistes. « Benoît [ex-conseiller de Martine Aubry au ministère de l’emploi] est clairement cornaqué par “Maman”, décrypte un élu socialiste. C’est un peu le fils qu’elle n’a jamais eu. Ils ont toujours eu un lien fort, même si c’est un lien compliqué. Pour Aubry, cette campagne de 2017 est une revanche sur sa défaite à la primaire en 2011, un juste retour des choses. Tout revient enfin dans son giron. »