Nils Bildt på Bill O'Reilly Factor Fox News
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Images : Fox News

Il est devenu, ce week-end, la cible préférée des internautes suédois sur Twitter, qui ne ratent plus une occasion de brocarder l’inconnu désormais le plus célèbre du pays. Son nom ? Nils Bildt, présenté comme « conseiller suédois en matière de défense et de sécurité nationale » par le journaliste conservateur américain Bill O’Reilly, jeudi soir 23 février, sur la chaîne Fox News.

C’est pour évoquer la politique d’immigration du royaume, attaquée à plusieurs reprises par le président américain, Donald Trump, depuis son discours du 17 février en Floride, que Nils Bildt a été invité sur la chaîne américaine. « Le débat politique suédois est totalement fallacieux, a-t-il affirmé lors de son intervention. Si vous n’êtes pas d’accord avec l’agenda de gauche, alors vous êtes considéré comme un outsider ou vous n’êtes pas pris au sérieux. »

Sur les réseaux sociaux, les partisans de Trump applaudissent. Sauf qu’à Stockholm, personne n’a jamais entendu parler de Nils Bildt. Ni le ministère des affaires étrangères ni l’armée. Et pour cause : le conseiller en question, né Nils Tolling, ne vit plus en Suède depuis 1994 et surtout, n’a jamais occupé de fonctions officielles.

Pas à son coup d’essai

Fils de l’ancien président de la Fédération suédoise d’équitation, il a changé de patronyme en 2013, adoptant le nom de famille de l’ancien premier ministre suédois Carl Bildt, qui a nié tout lien de parenté. Sa dernière adresse connue de l’administration suédoise est à Tokyo. Il vivrait désormais aux Etats-Unis, où il aurait créé plusieurs sociétés, dans la sécurité. Ironie de l’histoire : alors qu’il se présente comme un spécialiste des questions de criminalité, Nils Bildt a lui-même été condamné à un an de prison en 2014 par un tribunal de Virginie, pour ivresse sur la voie publique, ainsi que pour l’agression d’un fonctionnaire de police.

David Tabacoff, le producteur de l’émission « The O’Reilly Factor », a défendu le choix de l’inviter : « Notre programmateur a mené une série d’enquêtes et parlé avec des gens qui ont recommandé Nils Bildt. Après l’avoir préinterviewé et vérifié son CV, nous avons jugé qu’il serait un bon invité pour le sujet de l’émission ce soir-là. »

Dimanche soir, le tabloïd Aftonbladet a révélé que le personnage n’en serait pas à son coup d’essai. En 2013, il a tenté d’obtenir une place sur la liste du parti d’extrême droite Démocrates de Suède (SD), en vue des élections législatives de l’année suivante. Il exige alors de se retrouver en position de siéger au Parlement suédois, arguant de ses compétences dans le domaine de la sécurité et de son lien de parenté avec Carl Bildt. Son contact au sein de la formation d’extrême droite fait alors valoir que son patronyme pourrait être un atout : « Le fait qu’il soit un Bildt attirera l’attention, ce qui permettrait de capter des électeurs conservateurs. »

Nils Tolling a changé de patronyme en 2013, adoptant le nom de famille de l’ancien premier ministre suédois Carl Bildt, qui a nié tout lien de parenté

Finalement, les Démocrates de Suède renoncent. Un des dirigeants du parti remarque alors que « pour quelqu’un qui se présente avec de telles références et un tel carnet d’adresse », il circule « étrangement peu » d’informations sur lui sur Internet. Un point qui ne semble pas avoir dérangé Fox News.

Sur Twitter, où « Nils Bildt » fait le buzz depuis trois jours, les internautes s’amusent : « Chaos à la cérémonie des Oscars – Tout à fait dommage, mais des choses qui arrivent, commente l’expert et critique de cinéma Nils Bildt », écrit l’un d’eux. « Super que Nils Bildt ait remporté l’Oscar du meilleur film hier », raille un autre.

Pendant ce temps-là, en Suède, les propos du président américain continuent de diviser. Invités à en débattre dimanche soir, le ministre de l’immigration, Morgan Johansson, et le chef des SD au Parlement, Mattias Karlsson, se sont affrontés sur le plateau de l’émission « Agenda ». Le député d’extrême droite a assuré que M. Trump avait raison et que « c’était juste des détails qui étaient faux ». « Je suis fier de la Suède, mais vous avez surtout l’air d’en avoir honte », a déploré le ministre social-démocrate, ajoutant : « Pour chaque immigré dont vous dites qu’il a commis un crime, je peux en compter cent qui ne l’ont pas fait. »