Vingt-neuf nouvelles espèces de bégonias ont été décrites, pour la plupart dans les forêts de Malaisie. | Royal Botanic Garden Kew

C’est une publication qui ravira les naturalistes et, plus largement, les amoureux du monde végétal. Les Jardins botaniques royaux de Kew, organisation scientifique qui gère notamment les célèbres Kew Gardens de la banlieue londonienne, inscrits au patrimoine de l’Unesco, livrent, jeudi 18 mai, la deuxième édition de leur rapport annuel sur l’état des lieux mondial des plantes. Un « herbier » auquel ont contribué 128 scientifiques de 12 pays.

On y apprend que 1 730 nouvelles espèces de plantes ont été découvertes en 2016 sur la planète, dont certaines constitueront peut-être des aliments du futur. C’est le cas de onze variétés brésiliennes de manioc (Manihot esculenta), la denrée de base la plus répandue dans le monde après le maïs et le riz. Ces nouvelles variétés pourraient contribuer à diversifier la production du manioc, estiment les auteurs, en permettant sa culture sous des climats plus arides que ceux où il pousse aujourd’hui.

C’est aussi le cas de sept variétés d’Asphalathus, plus connu sous le nom de « thé rouge » ou rooibos en Afrique du Sud. Six d’entre elles sont malheureusement menacées d’extinction. Font aussi leur entrée dans l’inventaire de la flore comestible un panais (Pastinaca) de Turquie, un câprier (Capparis) des Philippines, ou encore du gingembre (Zingiber) d’Extrême-Orient.

Une nouvelle variété de panais découverte en Turquie. | Ali Kandemir

D’autres trouvailles intéresseront les adeptes des médecines traditionnelles, comme de nouvelles variétés de plantes grimpantes de la famille des Mucuna, qui produisent notamment le pois mascate, prisé par la médecine ayurvédique pour ses effets anti-vieillissement. Neuf espèces jusqu’ici inconnues ont été trouvées en Asie du Sud-Est, en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Plus globalement, le rapport évalue à plus de 28 000 le nombre d’espèces végétales aujourd’hui utilisées à des fins médicinales, même si très peu d’entre elles sont répertoriées comme telles dans les publications scientifiques.

Pour le simple plaisir des jardiniers et des horticulteurs à la recherche de couleurs et d’odeurs inédites, le rapport fait également état d’une moisson de nouvelles plantes ornementales, dont vingt-neuf espèces de bégonias repérées en Malaisie, et pas moins de 336 espèces d’orchidées poussant dans les forêts tropicales.

« Fondamental pour la vie humaine »

Les auteurs ne se contentent pas de cette brassée de découvertes. Ils pointent aussi les dangers que représentent, pour les écosystèmes, les plus de 6 000 plantes envahissantes désormais recensées sur le globe. Ils soulignent aussi les menaces qui pèsent sur le monde végétal, dont les incendies qui, chaque année, calcinent quelque 340 millions d’hectares, et surtout le changement climatique.

Une orchidée trouvée sur l’île de Madagascar, dont 83 % des plus de 11 000 plantes vasculaires ne poussent nulle part ailleurs. | Andre Schuiteman

Un chapitre s’attache à décrire et tenter d’expliquer les différences de vulnérabilité, au sein du règne végétal, vis-à-vis du réchauffement. Il met en évidence que les plantes possédant des feuilles et des écorces épaisses, des racines profondes, une matière ligneuse dense, ou mettant en œuvre des stratégies d’utilisation de l’eau plus efficaces, sont mieux armées face aux sécheresses, aux feux et à la hausse des températures. Ce qui, commentent les auteurs, pourrait orienter les choix des agriculteurs, qui auraient par exemple intérêt à privilégier des graminées à racines longues sur les terrains où les climats futurs seront plus secs, plutôt que des cultures à racines courtes telles que le blé.

« Une connaissance détaillée des plantes est fondamentale pour la vie humaine sur Terre, écrit Kathy Willis, directrice scientifique des Jardins botaniques royaux de Kew. Elles sont à la base de tous les domaines de notre vie quotidienne, de la nourriture que nous mangeons aux vêtements que nous portons, aux matériaux que nous utilisons, à l’air que nous respirons et aux médicaments que nous prenons. » Les plantes, ajoute-t-elle, « sont les fondements des écosystèmes mondiaux et elles contiennent potentiellement des solutions pour vaincre certains de nos problèmes les plus urgents ». Un patrimoine vert que le rapport veut inciter à « protéger et conserver ».